Henri Calet : « Depuis longtemps les foules m’attirent »
Durant l’hiver 1953, l’écrivain et journaliste Henri Calet se voit confier par Claude Bellanger, le directeur du Parisien Libéré, une enquête dont l’objet sera de parler « des conditions de vie de gens pris un peu au hasard ». D’abord intitulée « Un sur cinq millions », elle sera ensuite publiée en volume chez Gallimard, en 1954 sous le titre Les Deux bouts. L’enquête de Calet consiste avant tout à contempler la foule qui se déverse chaque jour dans la ville pour y travailler et à en extraire une personne au hasard afin de la transformer en « star » d’un jour. Chaque individu devient le prétexte d’une chronique qui, s’inscrivant dans un ensemble, contribue à décrire les multiples facettes d’une société marquée par le contraste. Il n’est pas ici question de traquer l’exceptionnel ou l’évènement sensationnel mais plutôt de rapporter « ces petites histoires » communes à tous qui font la « grande aventure de tous les jours ». Il s’agira de montrer comment les dix-huit portraits qui composent l’ouvrage dressent une radiographie de la société du début des années cinquante et comment ils dessinent en réalité l’existence exemplaire de la foule des anonymes qui demeurent à la marge des « Trente Glorieuses ».