The Last of Us part II : entre non-jeu et dissonance ludonarrative

Thierry L'hôte

01/03/2022

Plan de l'article :

  • La dissonance ludonarrative 
    • Une contradiction entre narrativité et interactivité
    • Définir la dissonance
  • The Last of Us part II 
    • Naughty Dog : un incontournable de la dissonance ludonarrative
    • La dissonance ludonarrative comme outil de distanciation
    • Le non-jeu comme réponse à la dissonance

Le jeu vidéo dit « d’action-aventure[1] » est aujourd’hui devenu un quasi-synonyme des productions AAA[2]. Citons par exemple la saga Grand Theft Auto, dont le cinquième épisode, sorti en 2013, s’est vendu à 90 millions d’exemplaires et a rapporté près de 6 milliards de dollars à l’éditeur Take-Two Interactive[3], ou la série Assassin’s Creed, qui a vu naître 12 jeux principaux, 17 épisodes dérivés et de multiples œuvres transmédiatiques entre 2007 et 2021. La légitimité ludique de ce genre si populaire n’a pourtant pas toujours été une évidence. Lorsque, en 2007, le concepteur de jeux canadien Clint Hocking nomme sans réellement définir la notion de « dissonance ludonarrative », il ravive des débats sur la coexistence entre interactivité et narrativité. Par ce terme qui a ensuite été repris aussi bien par des joueurs, des journalistes, que des chercheurs, Hocking désigne « la contradiction entre les aspects ludiques et narratifs d’un jeu vidéo[4] ». Les interprétations de la notion de « dissonance ludonarrative » sont pourtant si larges qu’elles en deviennent parfois incompatibles. Elles poussent à se demander si le phénomène existe réellement ou s’il ne s’agirait pas simplement d’un fantasme collectif. Pourtant, la persistance du sujet témoigne de son importance dans la compréhension de certains enjeux relatifs à la création de narrations interactives.
Cet article propose de définir la dissonance ludonarrative en s’appuyant sur un état des lieux de la recherche, puis d’interroger cette notion en tant que potentiel outil d’analyse et de conception de discours vidéoludiques. Ce questionnement sera mis en œuvre à partir de l’exemple récent de The Last of Us part II, conçu par les studios Naughty Dog et publié par Sony Interactive Entertainment en juin 2020 en exclusivité sur la console de salon PlayStation 4. Ce jeu, l’un des plus attendus de l’année 2020, a provoqué des réactions très vives de la part des joueurs. La dissonance ludonarrative y semble employée volontairement, en tant qu’élément central de l’expérience pensée par les développeurs du jeu. Ceci permet de constater les conséquences de la dissonance ludonarrative sur l’immersion de millions de joueurs lorsque celle-ci est employée volontairement par un développeur, ainsi que d’observer les procédés mis en place par les joueurs pour remédier à la tension ainsi introduite.

La dissonance ludonarrative

Une contradiction entre narrativité et interactivité

À la fin du XXe siècle, deux courants de pensée, les « ludologues » et les « narratologues », s’opposent au sein de la recherche vidéoludique[5]. La position des « ludologues » est que l’étude du jeu vidéo doit s’inscrire dans la lignée de l’étude du jeu en général, autrement dit, de ses règles ou, le cas échéant, de leur absence : en d’autres termes, le jeu se définit par les interactions entre le joueur et le système. Ils s’opposent aux « narratologues », qui voient au travers des premiers jeux d’aventure textuels l’héritage des médias narratifs ayant précédé le jeu vidéo, et pour qui la narration est constitutive. À ce sujet, Jesper Juul, ludologue, écrivait ainsi :

Il semble raisonnable d’affirmer que le poids de la narration vient d’une séquence d’événements passés, qui doivent se suivre, et que la fin de chaque histoire tient sa force, sinon du destin, d’une certaine logique causale et de l’inévitable. L’interactivité et les jeux, en revanche, sont définis par le fait que le lecteur/joueur peut influencer les événements présents. […] La narrativité et l’interactivité ne peuvent prendre place au même moment : la narration présuppose des sauts dans un temps compressé, l’interactivité requiert le temps réel. […] La narration interactive n’est pas impossible, j’entends, des œuvres peuvent être créées qui alternent entre la narration et l’interaction. Mais rien de nouveau n’est créé, seulement quelque chose d’égal à la somme de ses parties[6].

En d’autres termes, lorsque le texte disparaît ou que la cinématique s’arrête, le gameplay[7] reprend ; lorsque la cinématique ou le texte apparaissent, le gameplay cesse, et vice-versa. L’un constitue alors une interruption de l’autre. Juul cite également Walter Freitag. Si la source de cette citation est malheureusement introuvable, le propos offre néanmoins une image claire de comment les ludologues perçoivent ce conflit :

La plupart des gens imaginent qu’il y a un spectre entre les histoires écrites conventionnelles d’un côté et l’interactivité totale de l’autre. Mais je crois que nous avons réellement affaire à deux havres de paix séparés par un puits infernal capable d’absorber des quantités infinies de temps, de talents et de ressources[8].

En 2007, le concepteur de jeux vidéo Clint Hocking ressuscite ce conflit en introduisant la notion de « dissonance ludonarrative » dans une critique du FPS[9] Bioshock publiée sur son blog personnel, Ludonarrative Dissonance in Bioshock[10]. Il reproche aux aspects ludiques et narratifs du jeu de tenir des discours contradictoires sur son thème, l’objectivisme d’Ayn Rand : alors que le gameplay offre au joueur le choix d’y prendre part au détriment de la morale ou de s’y opposer, la narration, quant à elle, place le joueur en opposition à cette philosophie indépendamment de ses actions en jeu.

Définir la dissonance

Si Hocking parle de « dissonance » dans son article, il n’utilise jamais l’expression « dissonance ludonarrative » en dehors de son titre, et n’en fournit donc jamais de définition explicite. Christian Evan Erali[11] définit ainsi le phénomène en 2014 : « la dissonance ludonarrative est ce qui se produit lorsque le gameplay et la narration ne parviennent pas à s’harmoniser, menant à une expérience de jeu décousue et perturbée[12] ». Lauryn Ash[13] en fournit une définition similaire et plus détaillée en 2016 : « la dissonance se produit lorsque les interactions entre les mécaniques et la narration sont asynchrones ; que le gameplay n’est pas soutenu par des systèmes ; et quand les interactions entre la narration et les mécaniques de jeu créent une histoire décousue[14] ».
Ces définitions contiennent trois éléments notables : premièrement, la dissonance ludonarrative est décrite comme une faute presque accidentelle, comme un oubli ou une erreur ; deuxièmement, la narration et l’interaction ne sont plus perçues comme « contradictoires » comme à la fin des années 1990, mais comme étant « en contradiction », donc réconciliable ; enfin, elles introduisent la notion « d’harmonie ludonarrative », en opposition à la dissonance, suggérant qu’il est à la portée des développeurs de supprimer la dissonance ludonarrative. Ces définitions ont cependant une certaine porosité, car même si celle de Lauryn Ash suggère une cause, à savoir le gameplay non soutenu par des systèmes, elles peuvent inclure un grand nombre de phénomènes variés ; or, la porosité des définitions est un argument récurrent des détracteurs de la notion.
Robert Yang, en 2013, dans un article intitulé « la dissonance ludonarrative n’existe pas car ce n’est pas dissonant et tout le monde s’en fiche de toute manière », propose une nouvelle approche du phénomène :

C’est quand tu réalises que le bel homme sympathique que tu joues est un meurtrier de masse sociopathe, ou quand un personnage dans un RPG[15] « meurt » alors qu’il a déjà été mort et ressuscité une douzaine de fois auparavant, ou quand un soldat d’élite se retrouve incapable de passer une porte. […] C’est parfois intrinsèque à la conception d’un jeu dont le but est de tuer des gens, parfois on s’en rend compte après coup, parfois c’est un problème technique que l’on pardonne[16].

Il préfère ainsi à la dissonance ludonarrative le terme gameism, qui désigne largement des facéties ou conventions propres aux jeux vidéo, comme un personnage qui soignerait une blessure par balle en mangeant, et qui peut inclure un bug occasionnel ou une limitation technique. Comme le suggère le titre de son article, le joueur se souciant de la dissonance ludonarrative serait en fait un « mauvais joueur » refusant de « jouer le jeu ».
Frédéric Séraphine
[17] propose une autre définition de la dissonance ludonarrative. Selon lui, la dissonance ludonarrative serait une opposition entre les motivations, le contrat ludique, et les directions données au joueur, le contrat narratif. Elle mettrait en tension ce que le joueur attend du jeu et ce que le jeu attend du joueur. Cette observation place Frédéric Séraphine dans la lignée de Gonzalo Frasca, ludologue, qui explique que : « Contrairement aux narrations, les simulations ne sont pas simplement constituées de séquences d’événements mais incorporent également des règles comportementales[18] ». Ces règles comportementales sont aussi appelées game design patterns[19]. Si nous reprenons l’expérience précédente de Hocking avec le FPS Bioshock, nous pourrions en désigner trois : il s’agit d’un jeu à la première personne[20], mettant en scène un protagoniste muet[21] et demandant au joueur de faire des choix. La combinaison de ces modèles va amener le joueur à penser que le personnage est une extension de lui-même, une coquille vide qu’il est libre d’habiter, et qu’il exercera une influence sur la narration.
La dissonance ludonarrative serait ainsi la contradiction entre un discours implicite tenu par les mécaniques du jeu et un discours explicite tenu par sa narration, engendrant une prise de conscience du joueur, lequel remet en question les raisons pour lesquelles il joue. Cette définition, basée sur celles de Frédéric Séraphine, Robert Yang et Lauryn Ash, replace l’impact du phénomène sur le joueur au cœur de l’équation. En s’appuyant sur l’existence de « discours » ainsi que d’une « remise en question », elle suggère aussi la possibilité d’utiliser la dissonance ludonarrative volontairement pour communiquer une idée au joueur, une possibilité explorée en 2020 par le jeu The Last of Us part II.

The Last of Us part II

Naughty Dog : un incontournable de la dissonance ludonarrative

The Last of Us est un jeu de tir à la troisième personne (« TPS[22] »), un survival horror[23] se déroulant dans un monde post-apocalyptique, et un jeu d’action-aventure. Le scénario du premier opus est le suivant : après qu’un champignon parasite[24] a infecté et dévasté la population mondiale, l’humanité vit recluse dans des camps. Les joueurs ont le contrôle de Joel, qui a pour mission d’escorter une adolescente, Ellie, de la côte Est à la côte Ouest des États-Unis. Ellie, immunisée contre le champignon, serait la clé pour mettre fin à la pandémie. Au cours de l’aventure, Joel, qui a perdu sa fille vingt ans plus tôt, devient une sorte de père de substitution pour Ellie, qui est orpheline. Au terme du jeu, lorsqu’il apprend qu’Ellie ne sortira pas vivante de l’opération visant à fabriquer le remède, Joel retourne sa veste. Alors qu’Ellie est inconsciente, et qu’il est contrôlé par le joueur, il massacre le personnel innocent de l’hôpital pour la sauver, condamnant donc l’humanité pour préserver une seule personne.
Le jeu a été développé par le studio Naughty Dog, qui compte parmi les plus importants de l’éditeur et constructeur Sony. Il est à l’origine de multiples exclusivités à succès pour sa marque PlayStation, au premier rang desquelles The Last of Us, mais aussi les trilogies Crash Bandicoot et Jak and Daxter ou la série Uncharted. Ces exclusivités sont importantes pour les constructeurs, car elles sont un argument de vente pour leurs consoles face à la concurrence, et leurs personnages en deviennent des mascottes. Si Microsoft possède Master Chief, le protagoniste de Halo, et si Nintendo a des personnages iconiques comme Mario ou Pikachu, Ellie et Joel, les personnages principaux de The Last of Us, deviennent presque instantanément des icônes de la marque PlayStation. En effet, The Last of Us, dès sa sortie en juin 2013 sur PlayStation 3, est immédiatement considéré comme un classique. Le jeu reçoit un accueil critique presque unanimement positif de la part des joueurs comme de la presse, et plus de deux cents récompenses. Son succès est principalement attribué à son duo de protagonistes, Joel et Ellie, et à leur relation touchante.
Alors que The Last of Us était sorti sur une PlayStation 3 en fin de période d’exploitation, il est réédité sous le nom The Last of Us Remastered dès l’année suivante sur la nouvelle console de Sony, la PlayStation 4. Un premier trailer pour sa suite, The Last of Us part II, est révélé en décembre 2016, pour une sortie quatre années plus tard en juin 2020 (le jeu a été en développement pendant six ans). Le budget du deuxième opus de The Last of Us avoisinerait le double du budget moyen pour une production AAA : si Sony n’en a pas communiqué le budget précis, on peut l’estimer, compte-tenu de son importance pour la marque et de son temps de développement, en le comparant à d’autres productions similaires, à au moins 100 millions de dollars.
Outre l’ampleur des enjeux commerciaux, les attentes des joueurs vis-à-vis de cette suite sont donc très élevées. À sa sortie, The Last of Us part II a fait couler beaucoup d’encre. S’il a été très bien reçu par la critique et élu jeu de l’année aux VGA
[25], la réaction des joueurs a été nettement plus mitigée, marquée entre autres par un review bombing[26] d’une ampleur inédite. En nous intéressant aux critiques des joueurs, on constate ce qui peut apparaître de prime abord comme une contradiction : alors que certains saluent le jeu pour une prise de risque inattendue, d’autres lui reprochent précisément de n’avoir pris aucun risque.
Les deux « camps » font appel à la dissonance ludonarrative pour qualifier leur ressenti, l’un à un usage intentionnel de celle-ci, l’autre à un usage non intentionnel.
Il est à noter que la notion de dissonance ludonarrative n’est pas étrangère au studio Naughty Dog. Le premier The Last of Us ainsi que la série Uncharted ont été critiqués à cet égard en dépit de leur excellente réception. Uncharted 4 en particulier inclut un trophée
[27] intitulé « dissonance ludonarrative ». Ce dernier récompense le joueur pour avoir tué mille ennemis au cours de l’aventure, en référence au reproche selon lequel le protagoniste de la série, Nathan Drake, aurait des tendances meurtrières en gameplay jugées contradictoires par les joueurs et la presse avec sa personnalité affable présentée dans les scènes cinématiques. Neil Druckmann, auteur, programmeur et directeur créatif au sein du studio, va même jusqu’à présenter ce trophée comme l’une de ses fiertés[28].
Cela ne suffit pas à affirmer que la dissonance ludonarrative ait explicitement inspiré The Last of Us part II, mais nous savons au moins que ce sujet tient à cœur au directeur créatif et co-auteur du jeu. La définition de Frédéric Séraphine, une opposition entre la motivation du joueur et les directions qui lui sont données, semble par ailleurs s’appliquer à ce jeu.

La dissonance ludonarrative comme outil de distanciation

The Last of Us part II, comme son prédécesseur, est un TPS, un survival horror et un jeu d’action-aventure. L’aventure, ici, dure environ trente heures, dont onze de scènes cinématiques. Linéaire, la narration propose une seule fin, sans possibilité pour le joueur d’influer sur le déroulement de l’histoire.
Cinq ans après les événements du premier opus, Ellie vit dans une communauté recluse avec Joel. Dans les premières heures de jeu, elle assiste, impuissante, au meurtre de ce dernier. Au cours d’une scène précédant le meurtre, le joueur contrôlait un nouveau personnage nommé Abby ; dans cette scène, on voyait Joel secourir Abby (donc le joueur), laissant penser à la possibilité d’une alliance entre ces personnages. Or, durant une scène cinématique, sur laquelle le joueur n’a donc aucun contrôle, Abby tue Joel dès que celui-ci lui donne son nom.
Les trailers promotionnels diffusés pour le jeu donnaient deux informations sur le contenu de cette suite : Ellie, deuxième rôle le plus important du premier jeu, était présentée comme la nouvelle protagoniste, et on la savait également en quête de vengeance. Le joueur ignorait cependant que l’objet de sa vengeance était la mort de Joel. Le montage des trailers laissait fortement penser qu’Ellie souhaitait venger la mort de sa petite amie, Dina, et qu’elle était accompagnée par Joel au cours de son aventure, comme dans une inversion de rôles par rapport au premier opus. Une scène a par ailleurs été modifiée dans l’un des trailers pour faire apparaître Joel à la place d’un autre personnage et lui faire dire une phrase qu’il ne prononce jamais dans le jeu, dans un lieu où il n’apparaît jamais : « Tu crois que je te laisserais faire ça toute seule ?
[29]».
Ce n’est pas la première fois qu’un jeu se garde de dire toute la vérité sur l’identité de son protagoniste — Metal Gear Solid 2, en 2001, en a fait de même — ou qu’un jeu vidéo fait usage d’un faux-protagoniste — Assassin’s Creed III, en 2012, permettait d’incarner l’antagoniste dans ses trois premiers chapitres. Il n’est pas non plus nouveau qu’une scène apparaissant dans un trailer ne figure nullement dans un film ou un jeu vidéo. Il est cependant inédit qu’un jeu, AAA de surcroît, fabrique à moins d’un an de sa sortie une fausse cinématique dans le but d’entretenir une fausse croyance sur le scénario, en suggérant la suite des aventures de Joel et Ellie, dont la relation était déterminante pour le succès du premier opus.
Allant à l’encontre des codes habituels du genre survival horror (nocturne, solitaire et angoissant), le duo Joel-Ellie constituait une présence rassurante pour le joueur, dans une aventure qui se déroulait majoritairement de jour. De nombreuses scènes contemplatives donnaient au joueur l’opportunité de respirer et d’écouter les conversations des deux protagonistes. Le jeu faisait également usage de couleurs chaudes et saturées pour trancher avec la violence de certaines scènes durant leur road trip. The Last of Us part II fait au joueur la promesse d’une expérience similaire, mais ne lui accorde en fin de compte qu’une expérience sombre, angoissante et solitaire. Le jeu abandonne d’ailleurs les couleurs saturées de son prédécesseur pour une palette grisâtre, délavée.
Lorsque certains joueurs saluent la prise de risque de The Last of Us part II, c’est à cet aspect du jeu qu’ils font référence : l’abandon des éléments ayant fait le succès du premier jeu dans une scène ayant pour but de rendre l’antagoniste supposée, Abby, au moins aussi détestable aux yeux des joueurs qu’aux yeux d’Ellie. Des dissonances de ce type réapparaissent à plusieurs reprises au cours du jeu.
Durant les quinze premières heures du jeu, le joueur tue, dans la peau d’Ellie, les camarades d’Abby, afin de retrouver cette dernière. Lorsqu’Abby est enfin localisée, à la suite d'une cinématique annonçant un boss fight
[30], le jeu met le joueur dans la peau d’Abby au cours d’un flashback d’une douzaine d’heures. Durant celui-ci, en plus de découvrir la relation d’Abby aux victimes d’Ellie, le joueur comprend sa motivation derrière le meurtre de Joel : à la fin du premier jeu, le père d’Abby comptait parmi les victimes de Joel. Tout comme Ellie, Abby était donc en quête de vengeance pour un meurtre auquel le joueur a participé. Au terme de ce retour en arrière, le joueur revient à la confrontation entre Ellie et Abby, mais alors qu’il contrôlait précédemment Ellie et pensait affronter Abby, il contrôle désormais Abby et doit affronter Ellie. Le jeu demande une nouvelle fois au joueur de participer à la mort d’un personnage qu’il n’a a priori aucune envie de tuer.
Le joueur, dans la peau d’Abby, remporte le combat. Cependant, dans la scène cinématique suivante, Abby épargne Ellie à la demande d’un autre personnage secondaire. Quelques années plus tard, le joueur, dans la peau d’Ellie, part une nouvelle fois à la recherche d’Abby, et l’affronte cette fois-ci dans la peau d’Ellie. Indépendamment de la volonté du joueur, celle-ci épargne elle aussi Abby. Ellie perd tout de même deux doigts au cours de ce combat et rentre chez elle seule, désormais incapable de jouer de la guitare, son dernier souvenir de Joel.
Le thème de The Last of Us part II, annoncé par les développeurs avant même la sortie du jeu au cours d’une vidéo behind the scenes
[31], est l’idée que la violence engendre la violence. La manière dont le jeu évoque ce thème, faisant de la quête d’Ellie une suite d’échecs allant jusqu’à la mutiler, évoque la tragédie et la catharsis[32] du théâtre aristotélicien.
Les personnages sont plongés dans une violence physique et morale perpétuelle, aussi bien au cours des scènes cinématiques que des séquences de gameplay. Les survival horror mettent généralement en scène un personnage faible et impuissant face une adversité qu’il fuit. Ici, les protagonistes sont certes solitaires et démunis en territoire hostile, mais Ellie a choisi de se mettre dans cette situation et semble même s’en satisfaire. Le joueur peut ainsi démembrer, décapiter, calciner, exploser les corps de ses ennemis, les entendre appeler les noms de leurs camarades tombés au combat tandis qu’Ellie les insulte crûment.
La manière dont le jeu interrompt parfois cette violence pour forcer le joueur à changer, non seulement de point de vue, mais aussi le personnage qu’il joue, a cependant quelque chose du thêatre brechtien
[33], lequel se place en opposition au théâtre aristotélicien et à la catharsis. En usant de la « distanciation[34] », ou « effet d’aliénation », celui-ci a pour but d’empêcher que le spectateur puisse s’identifier à quelque moment que ce soit aux personnages mis en scène, de sorte à préserver son objectivité. Cela peut se faire avec un temps décousu, des flashbacks, en s’adressant au public ou en lui montrant les ficelles de la pièce, comme dans l’exemple de distanciation brechtienne souvent citée du « Lamento du Jardinier[35] » : durant l’entracte, le jardinier s’adresse au public et lui explique que : « Dans de pareilles histoires, ils ne vont pas s’interrompre de se tuer et de se mordre pour venir vous dire que la vie n’a qu’un seul but, aimer… ».
On est tenté d’associer ici les cinématiques du jeu à cet entracte : ces scènes interrompent les massacres ayant lieu dans le jeu, présentent l’amour des personnages envers leurs proches, et permettent à Ellie de remettre en question sa quête meurtrière. On trouve ici une qualité potentielle de la dissonance ludonarrative : celle-ci rejette l’immersion associée presque par défaut au medium vidéoludique. Le joueur s’interroge sur les ficelles de l’aventure à laquelle il prend part, ce qui l’ouvre à une approche critique autant de la narration du jeu que de son gameplay. Cependant, cette dissonance ludonarrative dans The Last of Us part II est imparfaite, dans le sens où elle requiert d’avoir non seulement joué au premier jeu, mais également de l’avoir suffisamment apprécié pour se soucier du devenir d’Ellie et Joel – faute de quoi, la dissonance serait constatée mais non pleinement ressentie, et donc pas nécessairement opérante en termes de réflexion critique.

Le non-jeu comme réponse à la dissonance

Les game design patterns utilisés dans The Last of Us part II pour mettre en scène la violence inouïe d’Ellie le sont aussi dans tous les autres jeux Naughty Dog sortis sur consoles de sept et huitième génération, depuis le premier Uncharted en 2007. Tout comme Nathan Drake de la série de FPS Uncharted est présenté comme un homme affable par la narration mais confiné à un rôle de meurtrier sociopathe par le gameplay, Ellie ne peut jamais échapper à son rôle de meurtrière dans un jeu ayant pour message final l’abandon de la violence. Ainsi, une impasse se crée : tout en appelant le joueur à se montrer critique envers la violence des personnages, le jeu contraint le joueur à prendre part à cette violence, tout en lui répétant à de multiples reprises que celle-ci est destructrice.
Le joueur est conscient, grâce à la narration, des doutes d’Ellie. Si de nombreux éléments scénaristiques ont été dissimulés en amont de la sortie du jeu, le thème (la spirale de la violence), a été révélé verbalement par le directeur créatif dans un behind the scenes. Le jeu dure une trentaine d’heures ; en soustrayant à cette durée les scènes cinématiques, le joueur a presque vingt heures pour se demander quel impact il peut avoir sur la quête d’Ellie. Certains joueurs vont avoir pour motivation de sortir de la boucle de violence et découvrir que le jeu leur permet, ou ne le leur permet pas.
La nature du joueur, au sein de l’expérience vidéoludique, est particulière. On ne peut guère le qualifier d’acteur, car s’il a effectivement le contrôle du personnage, il découvre néanmoins le déroulement des événements au même rythme qu’un spectateur. De même, alors que le rôle d’un acteur serait de rendre sa performance convaincante, le joueur ne se pose jamais la question de sa crédibilité dans le rôle du protagoniste. On ne peut, pour autant, le qualifier de pur spectateur : sans lui, le personnage ne peut progresser dans sa quête. Par ailleurs, un joueur ayant terminé un jeu a la possibilité de le rejouer et, y compris dans un jeu narratif linéaire comme The Last of Us part II, il est peu probable que ses séances de jeu se répètent à l’identique. Le joueur connaît déjà le déroulement des événements, les ennemis qu’il affrontera, les lieux qu’il visitera ; il a une meilleure maîtrise des mécaniques de jeu dans chaque scène. Le joueur est alors dans une situation où il en sait plus que le protagoniste. La position du joueur qui rejoue évoque, en quelque sorte, le Théâtre de l’opprimé d’Augusto Boal
[36], une forme de théâtre qui, comme celui de Brecht, rejette l’immersion : Boal appelle les spectateurs à endosser le rôle d’acteurs au cours de courtes scènes improvisées, représentant des oppressions, et rejouées autant de fois qu’il y a d’acteurs potentiels. La manière dont certains joueurs ont remis en question le jeu et ses systèmes pour répondre à la dissonance perçue suggère un débouché potentiel de la dissonance ludonarrative.
Certains joueurs ont ainsi tenté de terminer le jeu sans tuer qui que ce soit ou, du moins, en ne tuant pas plus d’ennemis que ceux qui sont absolument nécessaires à la progression de l’histoire : c’est ce que les joueurs appellent une pacifist run
[37]. Cela peut être accompli en connaissant la structure des niveaux, l’emplacement des ennemis, mais cela peut aussi demander au joueur la connaissance de bugs pour éviter de tuer des ennemis qu’il serait en temps normal obligatoire de tuer, et donc d’utiliser des procédés qui n’avaient pas été prévus par les développeurs. L’artiste et conceptrice Mary Flanagan appelle ce comportement des joueurs l’unplaying[38], ou le « non-jeu » ; non pas le fait de cesser purement et simplement de jouer au jeu, mais plutôt le fait de cesser de jouer au jeu de la manière voulue par les développeurs.
Jouer ainsi permet non seulement de remédier à l’idée présentée par le jeu au cours de la narration selon laquelle Ellie s’engagerait dans une descente aux enfers mais rendrait aussi, selon certains joueurs, plus marquantes les scènes où elle se reproche ses meurtres, perçues comme hypocrites du fait de ses centaines de victimes, du fait que ces scènes de lamentation ne surviennent qu’après la mort d’un personnage essentiel à l’avancée du scénario, et précèdent toujours finalement que plus encore de meurtres.
D’autres joueurs agissent directement sur la narration, dans et en dehors du jeu, utilisant une méthode que Flanagan appelle le « rewriting
[39] ». Certains Youtubeurs populaires, comme YongYea[40] ou AngryJoeShow[41], au cours de leurs critiques du jeu, ont proposé d’autres manières d’agencer les scènes du jeu de sorte à se réconcilier avec la narration. D’autres ont parfois agi sur cette narration directement en jouant, en faisant tomber Abby d’une montagne dans la scène, au début du jeu, où elle rencontre Joel, ce qui garantit la survie de ce dernier. Cela se solde par un game over[42], certes volontaire. D’autres ont fait le choix de perdre le boss fight contre Ellie, pour lui accorder la victoire. Ces derniers exemples émanent avant tout de joueurs n’ayant que peu de sympathie, sinon aucune, envers Abby, en dépit des tentatives des développeurs pour faire apprécier le personnage aux joueurs.
Enfin, certains moddeurs
[43] ont entrepris de changer eux-mêmes les modèles de personnages dans diverses scènes cinématiques du jeu, pour permettre à Joel de vivre plus longtemps, pour imaginer de nouvelles fins, une amitié entre Abby et Ellie... Ce dernier point n’est pas sans évoquer la « tromperie » de Naughty Dog, qui avait modifié le modèle de Jesse dans une scène pour le remplacer par Joel. Cette technique de non-jeu est appelée par Mary Flanagan le « reskinning[44] ».
Ces trois techniques – unplaying, rewriting, reskinning – posent des questions sur la manière dont sont conçus actuellement les jeux d’action-aventure. La dernière, en particulier, n’es pas à la portée de n’importe quel joueur. Par ailleurs, il s’agit de techniques de « non-jeu », pas de conception de jeu. Il pourrait cependant être intéressant de travailler leur adaptation, de se demander à quoi ressemblerait un jeu d’action-aventure appelant le joueur à prendre part à ce genre de modifications pour faire avancer ou modifier sa narration en réponse à une dissonance ludonarrative, tout en se demandant si ce genre de dispositif préserve les éventuels messages du jeu.
Cette idée ne serait toutefois pas tout à fait inédite : le jeu Doki Doki Literature Club!, sorti en 2017, demande dans sa dernière heure au joueur de trouver un fichier dans ses dossiers et de le supprimer pour faire avancer sa narration. La série Mass Effect s’est popularisée en permettant aux choix des joueurs dans chacun des jeux de la trilogie d’avoir un impact sur les suivants ; lorsqu’il rejoue à la trilogie, un joueur connaissant les impacts de chaque décision peut façonner l’histoire qui lui convient le mieux. Enfin, Dream, sorti en février 2020, est un jeu dont le principe est de permettre aux joueurs de créer des jeux via des outils de conception intégrés, rendus ludiques et intuitifs.

Conclusion

La dissonance ludonarrative, dans un jeu d’action-aventure, décrit une contradiction entre, d’une part, le conditionnement du joueur induit par les discours implicites que portent en eux les game design patterns, et d’autre part les discours explicites de la narration, qui donnent leur sens aux actions du joueur.
Nuisant à l’immersion du joueur, elle peut de prime abord sembler le parfait antagoniste de l’expérience vidéoludique, mais en empruntant à la distanciation brechtienne ou au théâtre de l’opprimé de Boal, on comprend comment celle-ci peut également ouvrir la voie à de nouvelles approches de conception de jeu, ainsi qu’en témoigne The Last of Us part II
. Ce jeu AAA, par son aptitude à toucher des millions de joueurs, est un cas d’école pour observer à la fois les réactions des joueurs face à un usage « volontaire » par les développeurs de la dissonance ludonarrative, et les limites actuelles de son usage.
Celle-ci trouve ainsi sa place dans la boîte à outil du narrative designer
[45]. Cette recherche pourrait être approfondie en s’intéressant de plus près à la nature de l’immersion dans le jeu vidéo, telle que décrite, par exemple, par Dominique Arsenault et Martin Picard[46], et à la mise en place de « puzzles ludonarrativement dissonants » qui pourraient être résolus par les joueurs via des techniques de non-jeu.


Bibliographie

            Ouvrages

Arsenault, Dominique et Picard, Martin, Le jeu vidéo entre dépendance et plaisir immersif : les trois formes d’immersion vidéoludique, Université de Montréal, 2011.

Boal, Augusto, Le théâtre de l’opprimé [1971], trad. Dominique Lémann, Paris, La Découverte, 1996.

Bogost, Ian, Persuasive Games: The Expressive Power of Videogames, Cambridge, The MIT press, 2007.

Brecht, Bertolt, Petit Organon pour le théâtre [1946], Paris, L’Arche, 1970.

Caillois, Roger, Les Jeux et les hommes : le masque et le vertige, Paris, Gallimard, 1958.

Flanagan, Mary, Critical Play: Radical Game Design, Cambridge, The MIT press, 2009

Frasca, Gonzalo, « Simulation versus Narrative: Introduction to Ludology », in. Wolf Mark J.P. (dir.), The Video Game Theory Reader, New York, Routledge, 2003, p. 221-236.

Huizinga, Johan, Homo Ludens : essai sur la fonction sociale du jeu, trad. Cécile Seresia, Paris, Gallimard, 1951.

Jenkins, Henry, « Game design as narrative architecture », in. Wardrip-fruin, Noah et Harrigan, Pat, First Person Shooter, New Media as Story, Performance and Game, Cambridge, The MIT Press, 2004.

Juul, Jesper, « A Clash between Game and Narrative: A thesis on computer games and interactive fiction », mémoire de maîtrise, Institute of Nordic Language and Literature, University of Copenhagen, 1999.

            Ressources en ligne

Ash, Lauryn, « Designing for Ludonarrative Harmony », 2016. Consulté le 14/12/21 (URL : https://www.academia.edu/34283487/Designing_For_Ludonarrative_Harmony)

Erali, Christian Evan, « Dissonance in Games: Refining Gamecraft », 2013. Consulté le 14/12/21 (URL : https://issuu.com/christianevanerali/docs/christian.erali_ludonarrative…)

Hocking, Clint, « Ludonarrative Dissonance in Bioshock: The problem of what the game is about », 2007. Consulté le 06/09/21 (URL : https://clicknothing.typepad.com/click_nothing/2007/10/ludonarrative-d…)

Séraphine, Frédéric, « Ludonarrative Dissonance: Is Storytelling About Reaching Harmony? », 2016. Consulté le 14/12/21 (URL : https://www.academia.edu/28205876/Ludonarrative_Dissonance_Is_Storytell…)

Yang, Robert, « Ludonarrative dissonance doesn’t exist because it isn’t dissonant and no one cares anyway », 2013. Consulté le 06/09/21 (URL : https://www.blog.radiator.debacle.us/2013/08/ludonarrative-dissonance-d…)

 

[1] Les jeux « d’aventure » étaient des jeux narratifs hautement textuels et proposant parfois au joueur des choix à certains embranchements pouvant le mener à différentes fins. Le jeu « d’action-aventure » propose au joueur de contrôler directement un protagoniste plutôt que de se limiter à de simples choix.

[2]Productions vidéoludiques soutenues par de grosses maisons d’édition, au budget pouvant atteindre des centaines de millions de dollars, au temps de développement frôlant parfois la décennie, et ayant pour ambition d’être vendues à des millions de joueurs. Elles sont vendues à prix fort, généralement autour de 70€ pour un jeu, et possèdent souvent diverses éditions de collection dont le prix dépasse parfois plusieurs centaines d’euros. Une production AAA est l’équivalent vidéoludique d’un blockbuster au cinéma.

[3] Selon les chiffres de MarketWatch en 2018. Consulté le 14/12/21 (URL : https://www.marketwatch.com/story/this-violent-videogame-has-made-more-…)

[4] Hocking, Clint, « Ludonarrative Dissonance in Bioshock: The problem of what the game is about », 2007. Consulté le 06/09/21 (URL : https://clicknothing.typepad.com/click_nothing/2007/10/ludonarrative-d…)

[5] Le clivage a été formalisé en 1999 dans un article resté fameux : Gonzalo Frasca, « Ludology meets Narratology: Similitude and differences between video games and narrative », Parnasso, 3, 1999. En ligne : https://ludology.typepad.com/weblog/articles/ludology.htm

[6]Ma traduction. « It may be reasonable to claim that the weight of the narrative comes from a sequence of past events, that have to follow, and that the end of every story gets is power from, if not destiny, then at least some causal logic and inevitability. Interactivity and games, on the other hand, are defined by that the reader/player can influence the events now. […] Narrativity and interactivity can not take place at the same time: Narration presupposes a jumping and compressed time, interactivity requires real time. […] The interactive narrative is not impossible, that is, works can be created that are alternating narrative and interactive. But it does not create something new, something just equal to the sum of its parts. (sic) » Juul, Jesper, « A Clash between Game and Narrative: A thesis on computer games and interactive fiction », mémoire de maîtrise, Institute of Nordic Language and Literature, University of Copenhagen, 1999.

[7] Abréviation de « How the game plays », « comment se joue le jeu », le terme peut faire référence aussi bien aux séquences de jeu qu’aux mécaniques de celui-ci.

[8] Ma traduction. « Most people imagine there's a spectrum between conventional written stories on one side and total interactivity on the other. But I believe that what you really have are two safe havens separated by a pit of hell that can absorb endless amounts of time, skill, and resources. » Ibid.

[9] Abréviation de « First Person Shooter », « jeu de tir à la première personne ». Désigne un type de jeu basé sur le tir dans lequel la caméra se trouve dans les yeux du protagoniste.

[10] Hocking, Clint, « Ludonarrative Dissonance in Bioshock: The problem of what the game is about », 2007. Consulté le 06/09/21 (URL : https://clicknothing.typepad.com/click_nothing/2007/10/ludonarrative-d…)

[11] Erali, Christian Evan, « Dissonance in Games: Refining Gamecraft », 2013. Consulté le 14/12/21 (URL : https://issuu.com/christianevanerali/docs/christian.erali_ludonarrative…)

[12] Ma traduction. « Ludonarrative dissonance is what occurs when the gameplay and narrative of an experience fail to harmonize effectively leading to a disjointed and overall disrupted gaming experience », dans ibid.

[13] Ash, Lauryn, « Designing for Ludonarrative Harmony », 2016, en ligne : consulté le 14/12/21 (URL : https://www.academia.edu/34283487/Designing_For_Ludonarrative_Harmony)

[14] Ma traduction. « Dissonance occurs when a game has an unsynchronized interaction between the mechanics and the narrative; has gameplay unsupported by systems; and when interactions between the narrative and game mechanics creates a disjointed story », dans ibid.

[15] Abréviation de « Role Playing Game », « jeu de rôle ».

[16] Ma traduction. « It’s when you realize your sympathetic handsome male player character is a sociopathic mass murderer, or maybe when a character in an RPG “dies” despite having already died and revived dozens of times before, or maybe the brief instance when an elite soldier NPC glitches in the middle of a doorway (…) Sometimes it’s intrinsic to making a game about killing people, sometimes you hope fridge logic kicks in, and sometimes it’s a technical quirk you forgive. »  Yang, Robert, « Ludonarrative dissonance doesn’t exist because it isn’t dissonant and no one cares anyway », 2013. Consulté le 06/09/21 (URL : https://www.blog.radiator.debacle.us/2013/08/ludonarrative-dissonance-d…)

[17] Séraphine, Frédéric, « Ludonarrative Dissonance: Is Storytelling About Reaching Harmony? », 2016. Consulté le 14/12/21 (URL : https://www.academia.edu/28205876/Ludonarrative_Dissonance_Is_Storytell…)

[18] Ma traduction. « Unlike narrative, simulations are not just made of sequences of events but they also incorporate behavioral rules. » Frasca, Gonzalo, « Simulation versus Narrative: Introduction to Ludology », in. Wolf Mark J.P. (dir), The Video Game Theory Reader, New York, Routledge, 2003, p. 221-236.

[19] « Schéma de conception de jeux. » Un ensemble de règles, mécaniques et solutions de design connues de tous, permettant de structurer rapidement une expérience ludique.

[20] Le joueur vit l’aventure au travers des yeux du protagoniste.

[21]  Ce trait renforce l’identification du joueur au protagoniste.

[22] « Third Person Shooter ». Par distinction avec les jeux FPS (« First Person Shooter »), le joueur voit le personnage qu’il contrôle par une caméra placée derrière son dos, au-dessus de ses épaules, et les mécaniques de jeu reposent sur le tir.

[23] Un jeu mettant l’accent sur la survie du personnage joueur dans un environnement hostile où la vie est fragile et les ressources rares, associé aux codes de l’horreur : la nuit, la solitude, l’angoisse.

[24] Il s’agit d’un cordyceps, variété de champignons parasitant de petits insectes, les poussant au massacre de leurs congénères pour se reproduire.

[25]Les Video Game Awards, aussi appelés The Game Awards, sont l’équivalent vidéoludique des Oscars, une cérémonie annuelle récompensant les meilleurs jeux vidéo sortis au cours de l’année.

[26]« Bombardement des critiques ». Pratique consistant à inonder, sur un très court laps de temps, les pages de notations réservées aux joueurs de critiques négatives ayant souvent peu de choses à voir avec la qualité réelle du jeu concerné. Initialement utilisée pour protester contre les pratiques commerciales abusives de certains éditeurs, la pratique est parfois aussi utilisée de manière abusive pour punir les développeurs jugés « coupables » par certains d’avoir commis des faux-pas créatifs.

[27] Les « trophées » ou « succès » récompensent certaines actions du joueur en jeu sans pour autant en faire directement partie.

[28]« “Uncharted 4” Director Neil Druckmann on Nathan Drake, Sexism in Games ». Consulté le 06/09/21 (URL : https://www.rollingstone.com/culture/culture-news/uncharted-4-director-…)

[29]Ma traduction. « You think I’d let you do this on your own? » Consulté le 06/09/21 (URL : https://youtu.be/II5UsqP2JAk) Dans le jeu, cette phrase est en fait prononcée par un autre personnage, Jesse.

 

[30]Un combat contre un ennemi plus puissant que les autres, intervenant au plus haut de la tension d’un niveau ou du jeu.

[31]« En coulisses », décrit une vidéo détaillant le processus créatif derrière une œuvre. « The Last of Us Part II – Inside the Story | PS4 ». Consulté le 06/09/21 (URL : https://youtu.be/mRj3B3GY9KM)

[32]La « purgation des passions », idée selon laquelle le fait d’assister à une scène de théâtre dramatique va permettre au spectateur de se libérer de ses vices en voyant la souffrance que ceux-ci infligent aux personnages sur scène.

[33] Brecht, Bertolt, Petit Organon pour le théâtre [1946], L’Arche, 1970.

[34]De l’allemand « verfremdungseffekt ».

[35] Giraudoux, Jean, Électre [1937], Larousse, 2008

[36] Boal, Augusto, Théâtre de l’Opprimé [1977], trad. Dominique Lémann, Paris, La Découverte, 1996.

[37]Une « run » est une partie complète d’un jeu linéaire. La run pacifiste implique que le joueur accomplit cette run sans tuer qui que ce soit.

[38]Flanagan, Mary, « Critical Play: Radical Game Design », The MIT press, 2009

[39] « La réécriture ». Flanagan, Mary, Ibid.

[40] YongYea, « The Last of Us Part 2 Review (Full Spoilers) ». Consulté le 14/12/21 (URL : https://www.youtube.com/watch?v=KOVH6l3jaFI).

[41] AngryJoeShow, « The Last of Us Part II – Angry Review ». Consulté le 14/12/21 (URL : https://www.youtube.com/watch?v=_-sTlYUeT8o).

[42] « Jeu terminé ».

[43] Le « modding » est une technique consistant à changer les éléments présents dans un jeu en agissant directement sur ses fichiers, sa programmation, ses modèles 3D, d’une manière qui n’a pas été prévue par les concepteurs du jeu.

[44]Un skin, de l’anglais pour « peau » désigne, en langage vidéoludique, l’apparence d’un objet en jeu, lequel peut ou non être un personnage. Le reskinning, ou modification du skin, pourrait être traduit approximativement par « rhabillage ». Flanagan, Mary, Ibid.

[45] « Concepteur narratif ».

[46]Arsenault, Dominique et Picard, Martin, Le jeu vidéo entre dépendance et plaisir immersif : les trois formes d’immersion vidéoludique, Université de Montréal, 2011.

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ISSN  2534-6431