Richard III, œuvre écrite en 1591 par William Shakespeare, met en scène l'ascension et la chute du tyran. Les pièces historiques de Shakespeare font leur entrée sur la scène française assez tardivement1
, mais surtout au XXe siècle – en particulier dans la deuxième moitié – et donnent lieu à des réalisations marquantes. Parmi elles, la mise en scène de Richard III de Georges Lavaudant au Festival d’Avignon en 1984.
À l’époque, Lavaudant est à la fois metteur en scène, acteur, scénographe, éclairagiste, réalisateur et adaptateur dramatique, mais aussi directeur artistique du Centre dramatique national des Alpes – qui produit le spectacle – et de la Maison de la culture de Grenoble. En choisissant ce texte classique, dans la version de Jean-Michel Déprats, il ne veut pas donner vie à une simple reconstruction historique, bien au contraire : sa mise en scène constitue une originale réinterprétation. Et d’ailleurs le metteur en scène se passionne pour cette pièce en l’envisageant comme un texte quasi-contemporain ; à ce propos, il déclare :
Un classique ça n'a de sens que si vous essayez tout d'un coup de lui donner un nouvel éclairage. Il n'y a pas une manière, encore une fois, esthétiquement correcte de monter une pièce classique. Elles n'ont de sens que parce que vous les montez dans une époque avec une certaine esthétique2
.
La question évoquée par Lavaudant suscite évidement des réflexions autour de la catégorie dans laquelle sa version personnelle du Richard III pourrait être inscrite, du point de vue des choix esthétiques dans la mise en scène. À mon avis plusieurs facteurs militent en faveur de la catégorie esthétique du maniérisme3
, et notamment les éléments qui concernent la torsion des corps, le grotesque, les effets de lumière, les artifices, les bizarreries, ainsi que la façon de jouer d’Ariel Garcia-Valdès dans le rôle de Richard III, protagoniste absolu et inoubliable de ce spectacle.
Maniérisme en scène
Bien évidemment, comme nous le rappelle Daniel Bougnoux4
, si on veut qualifier Lavaudant de maniériste, il faut d’abord s’entendre sur le terme maniérisme, car celui-ci donne lieu souvent à des malentendus, et son utilisation dans une acception péjorative n’est pas ce qui intéresse dans le présent cas.
Selon la tradition, le terme « maniérisme » est lié aux artistes italiens du XVIe siècle qui peignent à la maniera de Raffaello ou Michelangelo, c’est-à-dire des imitateurs qui n’arrivent pas à créer des œuvres de bonne qualité comme les Maîtres qu’ils cherchent à reproduire. Il s’agit évidemment d’une mauvaise qualification attribuée au maniérisme qui, en revanche, est le contraire de l’académisme, plutôt « une recherche frénétique de nouveauté. Ils [les peintres maniéristes] se plaisent aux déformations de lignes, aux groupements insolites, aux couleurs neuves, aux thèmes étranges5
. » L’ingénieuse originalité et la puissance d’avant-garde de ce courant artistique sont bien représentées, par exemple, par Parmigianino, Rosso Fiorentino, Pontormo, Bronzino. Achille Bonito Oliva rappelle que « l’identité du maniérisme, avec sa dynamique stylistique et son nomadisme culturel, est celle d’un art à la fois clos dans la finitude de ses formes et ouvert (tendu) vers l’expression du drame d’un langage qui avec ses torsions asymétriques s’affirme comme une contre réalité6
». L’art maniériste se distingue donc par un esprit extraverti, une prédilection pour les choses raffinées, extravagantes, excentriques, pour les détails bizarres mais suggestifs, pour les éléments hors contexte, les saveurs insolites, gourmandes, provocantes, sensuels, pour l’opposition à ce qui est rationnel, parfait, par l’accentuation de l’ambiguïté, des contradictions, des contrastes, comme le soulignent – parmi beaucoup d’autres – Arnold Hauser7
et Gustav René Hocke8
, dans leurs œuvres critiques sur le maniérisme. Même la pose et l’effet ont pour but d’éblouir le spectateur, afin de provoquer une réaction, y compris par l’exagération, la déformation, le déséquilibre, le grotesque ou les images érotiques.
Des critiques, publiées le lendemain des représentations de Richard III au Festival d’Avignon, témoignent de l’emploi de notions qui entrent en résonance avec celles de la catégorie esthétique du maniérisme :
Bref, ce spectacle funèbre, superbe et grotesque, où la politique devient un jeu sanglant et dérisoire, presque rêvé, est sans conteste le plus riche, le plus fort, le plus mystérieux qu’il nous ait été donné de voir au Festival d’Avignon. Tout tourne ici autour de Richard, à qui Ariel Garcia-Valdès de bout en bout fascinant, offre la frivolité énervée d’un jeune dandy romantique que la foudre aurait frappé, le réduisant à cette forme tordue et déjetée, à cette difformité, en qui, par bref éclats, la beauté apparait encore.[…] L’admirable est que, dans ces clowneries, dans ces personnages travestis, Georges Lavaudant réussit à faire circuler le tragique, donnant à certaines scènes (la mort de Clarence, par exemple) une sorte de grâce cruelle et burlesque, presque charmeuse, presque perverse, et qui est la marque même de sa mise en scène à la fois railleuse, perfide et tendre, avec un grain de fantastique9
.
Rêve, mystère, fantastique, forme tordue et déjetée, difformité qui contient de la beauté, grâce cruelle et burlesque, charmeuse et perverse ; voilà une synthèse évoquant déjà le maniérisme. Cette perception se confirme lorsque le compte-rendu de la pièce en vient à se focaliser plus précisément sur le corps de l’acteur principal :
Ariel Garcia-Valdès est donc Richard III, l’inachevé, le monstrueux. Tordu, cassé, jambes entravées, cheveux hirsutes, œil enflammé, bouche sanglante et sombre, rire sardonique, secoué sans cesse par on ne sait quel tremblement frénétique, il est dans le heurté, le brisé, la coupure […]. L’acteur met son corps à la torture : métaphore d’une pensée qui ne parvient pas à s’accomplir sereinement mais hésite entre tyrannie et abandon à l’enfance, à la puérilité10
.
Des caractéristiques maniéristes concernant la torsion, la convulsion, le grotesque émergent donc clairement par la description du corps tordu, cassé, l’œil enflammé, la bouche sanglante. De façon plus générale, c’est bien la conception d’ensemble de la mise en scène du Richard III de Lavaudant qui se révèle maniériste comme souligné par les mots de Colette Godard, sur Le Monde :
Un jeu, un drame de cape et d’épée désamorcé […] Plus rien n’est vivant sur scène, pas même les voix détachées des corps, amplifiées par des microcravates. Le théâtre tombe sur cette période historique comme un cercueil de glace. L’horreur est devenue une féerie noire, une imagerie fastueuse et poétique. Montés sur d’immenses chevaux artificiels qui glissent en levant très haut les pattes, Richard et Richmond s’affrontent dans un bref duel. Leurs gestes sont lents et larges comme ceux des automates qui tournent en cercle fermé et marquent les heures aux horloges des cathédrales11
.
Voilà donc un ensemble d’images somptueuses où l’artifice, le rituel et l’exagération gagnent de plein droit leur place. Sur scène, le mouvement se trouve ainsi figé dans des poses pas naturelles ; de telles poses pourtant contiennent en elles-mêmes la dynamique et le développement de l’action – ce qui constitue encore, en soi, un autre indice renvoyant nécessairement au maniérisme.
À propos de la mise en scène de Richard III, Georges Lavaudant spécifie d’ailleurs lui-même : « j’ai horreur du naturel sur la scène, je me le suis toujours interdit […] et c’est vrai que le cinquième acte a été composé d’une manière un peu figée, artificielle12
. » Au cours d’un entretien, avec Jean-Michel Déprats, il précise son intérêt pour cet aspect cabotin, farceur dans Richard III :
Ce qui nous intéressait le plus ce n’était pas de montrer l’histoire mais son côté burlesque, grotesque, irrévérencieux […] son aspect bouffon et parodique13
.
Un peu plus loin dans le même entretien, Lavaudant ajoute que cette préséance accordée à une interprétation surjouée, n’a cependant rien de gratuit, puisque ce sont justement ces pitreries de scélérat qui sont chargées de restituer le fond et le sérieux de l’intrigue :
Il ne s’agit pas d’un suppléant à la mise en scène destiné à rendre le spectacle plus plaisant. Au contraire ce style de jeu excessif est toujours dangereux, il élève la bouffonnerie au rang de pensée politique. […] La distance que nous prenons par ce biais n’a rien d’un jugement intellectuel, elle est pudique et humaine quand la douleur à exprimer est tellement violente qu’on se sent incapable de l’incarner. Elle est si difficile à comprendre qu’on est obligé de la déplacer, de prendre un détour […] À travers les bouffonneries du criminel on voit le caractère grave ou sérieux du crime. Les deux éléments jouent entre eux et donnent à la pièce son caractère grinçant, comique, répugnant parfois14
.
Figures dans la déformation
Il est intéressant de constater que, de même que « le maniérisme se définit comme un mouvement fondamentalement anti-classique, de même l’art de Shakespeare cherche à se libérer de la rhétorique et des codes formels devenus impropres à exprimer le monde. Cette libération passe par l’affirmation d’une certaine dysharmonie15
. » Et bien sûr le texte de Shakespeare, qui aborde la question de la déformation et du monstrueux, en facilite la mise en scène et le versant non naturel, tout en rappelant que dans la Renaissance le terme « monstrueux » était souvent appliqué à quelque chose qui n’était pas naturel, dans virtuellement n’importe quelle catégorie16
.
Cependant, Montaigne, estimé maniériste, écrit :
Ce que nous appelons monstres ne le sont pas à Dieu, qui veoid en l'immensité de son ouvrage l'infinité des formes qu'il y a comprinses […] Nous appelons contre nature, ce qui advient contre la coustume : rien n'est que selon elle, quel qu'il soit. Que cette raison universelle et naturelle chasse de nous l'erreur et l'estonnement que la nouvelleté nous apporte17
.
Voilà donc au début de la pièce shakespearienne le discours de Richard III, qui en tant que symbole du pouvoir est censé représenter l’ordre et qui en revanche incarne toute l’horreur d’une répugnante tyrannie à travers sa difformité :
[…] moi qui suis rudement taillé et qui n’ai pas la majesté de l’amour — pour me pavaner devant une nymphe aux coquettes allures, — moi en qui est tronquée toute noble proportion, — moi que la nature décevante a frustré de ses attraits, — moi qu’elle a envoyé avant le temps — dans le monde des vivants, difforme, inachevé, — tout au plus à moitié fini, — tellement estropié et contrefait — que les chiens aboient quand je m’arrête près d’eux ! — eh bien, moi, dans cette molle et languissante époque de paix, — je n’ai d’autre plaisir pour passer les heures — que d’épier mon ombre au soleil — et de décrire ma propre difformité18
.
Le corps humain de Richard III, en tant que différent, devient donc inévitablement porteur de sa déviance, par rapport à la nature et conséquemment aux prédispositions morales. Mais il faut rappeler aussi qu’il y a un lien dans le maniérisme entre érotisme et déformation : à la difformité on lie souvent des supériorités sexuelles, car au XVIe siècle en effet « on pensait que la difformité physique causait une altération dans l’économie érotique du corps19
».
Voilà ce que raconte Georges Lavaudant à ce sujet :
Richard III, le personnage, donc la pièce de Shakespeare, exhibe ce bras atrophié. Il le dit lui-même. Il l'exhibe et il s'en sert. Il s'en sert pour séduire, pour faire pitié. Alors, c'est vraiment une pièce qui est absolument magnifique parce qu'elle est justement contraire à l'époque où on voudrait tout lisser, tout nettoyer. Richard III prend le pouvoir en accumulant et en exhibant ses défauts. D'abord ses défauts corporels et ensuite ses défauts, on pourrait dire, moraux. […] Et vous avez cette scène absolument impossible, et qui le restera à tout jamais, qui est sublimissime, de Lady Anne, dont il a tué et le père et le mari, et quasiment ils font l'amour sur le cercueil du père. Il y a une virtuosité de montrer comment la séduction peut agir qui n'a jamais été égalée20
.
D’ailleurs certains tableaux de Giulio Romano, auteur aussi de célèbres dessins érotiques, ne manquent pas d’érotisme mêlé au grotesque ; comme l’observe l’historien Gustav René Hocke à ce propos, « le platonisme pétrarquiste se mue peu à peu en pansexualisme maniériste. Les représentations érotiques deviennent elles aussi “fantastiques” : graveleuses, perverses, ludiques21
[…] ».
Au cours de la période du maniérisme, on joue avec les déformations, sans leur donner forcément une signification négative : il suffit de penser à l’Autoportrait dans un miroir convexe de Parmigianino, dans lequel l’énorme main sort presque du tableau, ou encore à sa Vierge au long cou, une Madone qui semble anticiper celles de Modigliani. L’ambiguïté, la disproportion éclate clairement et librement, devenant parfois caricaturale : la diversité est une autre forme de perversion, comme la sensualité ou la sexualité ambiguë et douloureuse qui suscite la curiosité, l’érotisme et parfois incite à un certain voyeurisme chez le spectateur, même s’il ne s’agit pas d’un but explicitement déclaré.
Ariel Garcia-Valdés, acteur maniériste ?
Richard III, dans la mise en scène de Lavaudant, est interprété par Ariel Garcia-Valdès. Un pareil choix pourrait sembler hasardeux, étant donné que Garcia-Valdès est non seulement un excellent comédien, mais aussi un acteur beau et charmant, ce qui pourrait rendre difficile l’interprétation de son rôle. Et pourtant, même si on peut la juger audacieuse, cette contradiction entraîne un déséquilibre intéressant et déclenche un rapport de fascination – ce qui constitue une autre caractéristique du maniérisme.
Lavaudant l’explique en ces termes :
Avec Ariel j’avais la possibilité de présenter un Richard un peu burlesque. Qu’il soit beau n’était pas un obstacle, bien au contraire. L’acteur beau rêve de s’enlaidir, comme l’acteur laid rêve d’être beau. […] Ariel exorcise la beauté en se rendant laid mais dans la grâce […] cette grâce qui sauve même les êtres les plus abominables, au théâtre seulement. […] la voix d’Ariel est une caresse qui se retourne en violence22
.
Georges Banu, qui a étudié la relation entre théâtre et maniérisme, à propos de certains spectacles des années 1980, souligne que « le corps se découpe, se détache, s’isole dans des attitudes rares toujours extravagantes : ce corps s’affirme comme graphisme23
». Selon Banu, cette approche maniériste du corps se retrouvait également à l’époque « chez Ariel Garcia-Valdès dans Richard III, mis en scène par Georges Lavaudant24
[…] » et il ajoute :
L’acteur maniériste semble être presque bidimensionnel : chez lui la plasticité l’emporte sur le vécu et le regard sur l’émotion. Il défie l’organique et s’attaque au possible du corps en le traitant avec une exubérance ludique24
. L’acteur maniériste nous apparait comme un acteur qui affirme sa révolte contre le réalisme et son insoumission à l’égard de l’expression organique ; il cultive le goût de l’artifice et ainsi il se désolidarise du courant principal de la scène européenne. Il renvoie à une plastique particulière autant qu'à une convention habituellement réservée à un « maniérisme » pictural qui, lui aussi, a toujours perturbé les codes de l’art occidental25
.
Ariel Garcia-Valdès, concernant la construction de son personnage, explique avoir utilisé comme inspiration la phrase « Je suis trop enfant, trop innocent pour ce monde » que Richard III prononce mais « au lieu de jouer le boiteux, [il a] essayé au contraire de danser, de rendre l’infirmité séductrice » : la difformité qui est ainsi affichée peut renverser l’idée de l’infirmité26
.
Le but de l’artiste est atteint et son interprétation est extraordinaire : c’est « ce personnage incarné par Ariel Garcia Valdés qui domine le spectacle. Mi-ange mi-démon, Richard est habité d’une grâce perverse, d’une frénésie qui ne lui laisse aucun repos. Hirsute, le teint blafard, la bouche déformée par un rictus sanglant, il accumule les crimes mais sans être plus odieux que ses victimes, elles aussi grinçantes et corrompues27
. »
Excès et crise
Achille Bonito Oliva, pour sa part, éclaire la question de la déformation dans le maniérisme en précisant tout à fait qu’« avec le maniérisme il faut plutôt parler de déformation que de forme. En perdant sa frontalité par rapport au monde, l’artiste maniériste assume une position de latéralité perfide qui lui permet d’observer le réel au-delà de sa sphère d’influence personnelle28
». Dans le même temps le critique d’art observe que « la forme garantit d’ailleurs la possibilité de maintenir dans un espace circonscrit les flux irréguliers et pourtant pleins de grâce de la fantaisie et de l’inspiration29
».
Dans ce cas précis, il est sans équivoque : le théâtre n'est pas un miroir de la vraie vie, il n'est pas une imitation de la nature. La façon de jouer, qui peut sonner fausse, n’est pas une mauvaise imitation de la bonne ; le jeu contrefait de l’acteur ne résulte pas d’une incapacité ; de même pour la déformation d'images et d'expressions, ou pour la tragi-comédie ridicule qui en fait déclenche le sentiment de l'imminence de la tragédie. Il s’agit de décisions esthétiques conscientes, des choix, comme c’était le cas pendant le maniérisme.
Concernant les nombreuses autres bizarreries, si maniéristes, présentes dans le spectacle, Lavaudant répond : « on m’a demandé pourquoi le rôle d’enfant était tenu par un nain. En fait il s’agit d’un lilliputien, ils n’ont pas de déformations, ils ont un corps en réduction […] et je me suis dit que ce serait beaucoup plus pervers d’introduire un lilliputien […]. Pour moi c’est un petit Richard, un double encore innocent30
» Perversion, introduction de petites figures disproportionnées par rapport au reste : c’est très maniériste.
Les critiques parlent de « bouffonnerie sanglante, de cruauté joyeuse » et encore d’« une tragédie historique montée en farce caracolante31
». Ces contrastes, exaspérés, se révèlent très efficaces, éblouissent le spectateur tout en lui permettant de profiter de ce classique shakespearien, vu d’une autre perspective, celle, insolite et formidable, proposée par Lavaudant :
D’un bout à l’autre, le drame shakespearien prend des allures de farce sinistre. Banquets et conspirations se déroulent sur de la musique espagnole ou de mandolines italiennes. Le monstre construit ses plans de bataille en déplaçant des verres sur une table, le meurtre de Clarence est réglé comme un numéro de clowns. Enfin l’image la plus controversée reste sans doute celle du roi mort dont on transporte la dépouille sur la scène dans une voiture d’enfant. Cependant, bien qu’elle soit très appuyée, la parodie ne vise pas à tuer l’émotion mais est plutôt envisagée comme un nouveau moyen d’accéder au tragique. […] l’action se déroule devant des murs nus sur un carrelage gris sombre et blanc maculé de sang, des trappes s’entrouvrent pour engloutir les cadavres. S’y ajoute le baroque inquiétant de fards et des costumes : habits noirs et fraise à la Van Dick pour les hommes, robes rouges paillettes et perruques flamboyantes pour les femmes. Ainsi mêlant adroitement le bouffon et le tragique Lavaudant parvient à renouveler la vision du drame sans pour autant le dénaturer32
.
Cette description met en exergue plusieurs caractéristiques, qui, comme on a vu, sont présentes dans la catégorie esthétique du maniérisme. Il est nécessaire d’ajouter ici une précision : il s’avère que parfois, comme on vient de le voir, la référence est le baroque et non le maniérisme, mais cela n’est pas correct. Sans vouloir ici aborder la complexe question de la différence entre maniérisme et baroque, il me semble utile de rappeler que, par exemple, la joyeuse exagération du baroque n’a rien à voir avec le profond sentiment de crise qui habite le maniérisme et lui est propre, pour les raisons historiques et sociales qui – comme le souligne l’historien Tibor Klaniczay33
– caractérisent sa naissance.
La qualification de baroque est souvent une imprécision, une simplification, due au fait que le maniérisme en tant que catégorie esthétique est assez méconnu à cause aussi de la mauvaise acception de ce terme dans le langage commun. Le mot maniérisme est en effet employé habituellement dans la langue française surtout pour désigner une qualité, perçue comme négative, de ce qui est maniéré, affecté, inauthentique.
De maniérisme en maniérisme.
Il semble enfin utile d’analyser brièvement deux œuvres liées au Richard III de Lavaudant, une antérieure et une postérieure : respectivement la mise en scène de Richard III de Carmelo Bene et le film de Raoul Ruiz, car elles aussi contiennent des éléments typiques de la catégorie esthétique du maniérisme.
En effet Lavaudant – avant le Richard III présenté au Festival d’Avignon en 1984 – avait déjà travaillé sur l’adaptation de Richard III par Carmelo Bene, en mettant en scène La Rose et la Hache en 1979, une version de la célèbre tragédie, réduite et irrévérencieuse – dans laquelle le protagoniste était déjà le prodigieux Ariel Garcia Valdès, Georges Lavaudant jouant alors la Reine Marguerite.
Carmelo Bene a joué Riccardo III en 1977, puis il en a fait un film, et en 1978 la maison d’édition Feltrinelli a publié Superposition, un texte où il explique aussi l’évocation de l’ambiance funéraire, des miroirs, des fleurs, les atmosphères corrompues, érotiques ; la réinterprétation de Riccardo insiste sur un personnage fragile, vulnérable et sur la présence féminine. Le philosophe Gilles Deleuze écrit ensuite Un manifeste de moins, une tentative d'expliquer ce théâtre de Carmelo Bene.
Le Riccardo III de Carmelo Bene présente des éléments du maniérisme, comme déjà sa propre description de la scène le suggère :
Le duc de Gloucester, en habit noir de circonstance. / Lady Anne Warwick, ensorcelée sous l’outrage des événements, pleure près du cercueil d’Henri VI. / Madame Shore dort, retenue et pourtant relâchée, dans un grand lit d’un blanc couleur de trône. / Un crâne sur un plateau. / Funèbre est tout le décor : des cercueils et des miroirs partout. / Partout des tiroirs : ils contiennent de la gaze, des bandes blanches et des accessoires déformants dont pourrait bien tirer gloire un beau Richard III traditionnel… / L’horloge, comme chez Poe, scande son tic-tac ; sur le tapis, beaucoup de fleurs, fraîches et flétries, mais en si grand nombre que l’on trébuche – tout est parsemé des roses blanches et rouges des York et des Lancaster, si l’on veut34
…
Bene interprète Richard III d’une manière bouleversante, qui déstabilise le spectateur : il « exalte la posture du protagoniste, mais en la détournant et en l’accablant, en la désignant par une valence qu’elle n’a jamais eue35
» et par conséquent son Riccardo III « se formera, où plutôt se déformera suivant une ligne de variation continue36
» et en outre il ne cessera pas « de perdre l’équilibre, de glisser…37
». Les dynamiques, les lignes de tension entre les corps, si fondamentales dans le courant artistique picturale du maniérisme, se réaffirment avec vigueur dans l’œuvre de Bene et suivent « des rapports de force où chaque corps fait obstacle au corps de l’autre […] les gestes et les mouvements sont mis en état de variation continue les uns par rapport aux autres et chacun pour lui-même38
», et par cela comme « sur une ligne de fuite créatrice 39
». La perte d’équilibre, l’action dans la variation, sont des éléments typiques du maniérisme où le doute, la crise, l’angoisse de l’époque, se manifestent aussi dans les torsions des figures, le manque de stabilité, la précarité (un exemple typique est la Déposition de croix de Rosso Fiorentino).
En outre, la manière de jouer de Carmelo Bene, qui notoirement a inventé une façon très originale de travailler sur la voix, donne au personnage de Richard III une perverse étrangeté tout à fait efficace. Ariel Garcia Valdés dit à propos de Carmelo Bene : « C'est lyrique, c'est déclamé, c'est bouffon et pitoyable, c'est génial. C'est le plus grand artiste que j'aie jamais vu de ma vie40
. [...] ». Par conséquent, comme Lavaudant le rappelle :
[…] on s'est mis à se passionner pour Carmelo Bene, et on a lu cette adaptation et on a monté la pièce. Mais moi, lorsque j'ai monté la pièce je n'avais ni vu de films de Carmelo Bene, ni vu de spectacles de Carmelo Bene. Ça passait par l'invention ou comme me le racontait Ariel, c'est-à-dire Ariel me mimait Carmelo Bene. […] Par exemple, dans la version de Carmelo Bene, il n'y a pas d'hommes du tout, il n'y a même pas le roi, il y a Carmelo Bene et les femmes. Et c'est lui qui dit qu'il a voulu débarrasser la pièce, effectivement, de tout ce qui est intrigue politique. En fait, les intrigues politiques, c'est lui les rêvant tout seul, et puis de temps en temps il y a les femmes qui sont autour. En fait, il essaie d'apitoyer, de séduire et de faire pleurer les femmes, de temps en temps, en leur donnant des claques sur les fesses. Mais pratiquement dans tous les spectacles de Carmelo Bene il y a ce type de rapport24
.
Il est donc évident que Bene n’est pas très passionné par les aspects psychologiques du pouvoir : il préfère insister sur les jeux de séduction, de puissance, érotiques, il est plutôt intéressé par la recherche d’une puissante composition scénique, par « […] les éléments constitutifs qui doivent être combinés pour le déploiement du pouvoir érotique41
. » Et il conçoit des bizarreries qui concordent bien avec sa vision de Richard III ; Lavaudant raconte que Carmelo Bene décrit « Richard III comme une tragédie qui se jouerait sur une place italienne sur le son des mandolines. C’est cette image que j’ai mis en scène42
» et il utilise tout à fait ces éléments : « la musique, cela a été une question polémique. Pourquoi les mandolines par exemple ? Elles viennent directement de Carmelo Bene dans les notes de son introduction : “Richard III il faut le jouer comme sur une piazza italienne, on mange des fruits de mer et on entend des mandolines43
” ».
Et si Carmelo Bene a influencé Lavaudant, c’est bien Lavaudant qui a influencé Raoul Ruiz.
Dans son Richard III (1986), film méconnu, le cinéaste chilien réinvente le classique shakespearien, inspiré de la mise en scène de Georges Lavaudant pour le festival d’Avignon en 1984. On y retrouve des traits maniéristes, des atmosphères farcesques, non réalistes, mélangées à des traits caractéristiques de l’expressionnisme et du surréalisme. Mais après tout, il est bien connu que ces mouvements ont plusieurs caractéristiques en commun avec le maniérisme, par exemple l'artifice, l'illusion, la distorsion, le grotesque, le fantastique. Par ailleurs, la période historique lors de laquelle ils sont nés est la même que celle de la redécouverte du maniérisme.
Ruiz souligne également les aspects parodiques dans la représentation du pouvoir et « met en œuvre une esthétique de la déformation, revendiquant tous les effets du septième art : trucages, usage de filtres, changement de focales, jeux d’ombre et de lumière, faux raccords, mouvements de caméra complexes44
». Déformation, clair obscurs, effets spéciaux, perspectives insolites, jeux optiques : Parmigianino, Pontormo, Giulio Romano, ne pourraient qu’apprécier. Le style de Ruiz est aussi recherché, sophistiqué, subtilement narquois, surprenant, déconcertant. D’ailleurs « l’écriture filmique permet à Raoul Ruiz d’opérer, pour Richard III, une déliaison discrète du matériel théâtral, traité avec distance ou ironie. C’est le cas, par exemple, du cortège funèbre du roi Henry VI, remplacé par une procession de pénitents noirs poussant chacun un landau d’enfant45
[…] ». Même « la rareté des plans fixes qui en paraissent d’autant plus violents, le tournage au ralenti des plans généraux, l’utilisation des lumières rasantes de fin de journée et le recours assez systématique aux gélatines, le cadrage en contreplongée de Richard III/Garcia-Valdès sont autant de procédés très marqués dont Ruiz aime l’usage46
» et qui s’inscrivent dans ses choix esthétiques décidément maniéristes.
Il est curieux à ce sujet de remarquer comment Ruiz lui-même met en cause le maniérisme dans son acception la plus traditionnelle, en considérant le Richard III de Lavaudant presque comme un classique : il affirme en particulier avoir pris ce spectacle et en avoir fait « un film entièrement parodique : ce sont des parodies qui se lient les unes aux autres, ce sont des jeux de références pour moi. Et cela joue sur la manière : c’est “à la manière de” : film qui commence à la manière de Lavaudant47
».
Une question alors se pose : chaque œuvre maniériste peut-elle devenir à son tour le classique dont surgira une nouvelle déclinaison maniériste ? Certes, la réponse peut se révéler complexe, mais ce qui est sûr c’est que, à la lumière de tout ce qui précède, il est bien envisageable de pouvoir apparenter le Richard III de Georges Lavaudant à la catégorie esthétique du maniérisme, en vertu des choix esthétiques qu’il a opérés dans sa remarquable mise en scène.
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- 1Catherine Treilhou-Balaudé, « Shakespeare, la France, la scène : une histoire lente », Études théâtrales, vol. 44-45, n° 1, 2009, p. 102-109.
- 2Georges Lavaudant, Grands Entretiens. Mémoire du théâtre. Georges Lavaudant. [En ligne] https://entretiens.ina.fr/memoire-du-theatre/Lavaudant/georges-lavaudant [Site consulté le 25 Mars 2018].
- 3La possibilité de reconnaitre le maniérisme dans cette œuvre de Georges Lavaudant est un des arguments de ma thèse « Un nouveau maniérisme ? Une catégorie esthétique et ses réinterprétations dans le théâtre européen des dernières décennies du XXe siècle. »
- 4Daniel Bougnoux, « Les Enchères Du Rêve », dans Yan Ciret (dir.), Archipel Lavaudant, Paris, Christian Bourgois Éditeur, 1997, p. 47.
- 5Giuliano Briganti, Le Maniérisme italien, Paris, Gerard Monfort Editeur, 1993, p. 21.
- 6Achille Bonito Oliva, L’Idéologie du traître. Art, manière, maniérisme, Paris, L’Harmattan, 2006, p. 18.
- 7Arnold Hauser, Il Manierismo. La crisi del Rinascimento e l’origine dell’arte moderna, Giulio Einaudi Editore, Torino, 1965.
- 8Gustav René Hocke, Labyrinthe de l’art fantastique. Le maniérisme dans l’art européen, Paris, Denoël-Gonthier, 1977.
- 9Pierre Marcabru, « Dérisoire et sanglante féerie », Le Figaro, 21-22 juillet 1984.
- 10Armelle Heliot, « Et Avignon recréa “Richard III” », Le Quotidien de Paris, 19 juillet 1984.
- 11Colette Godard, « Richard III à Avignon. L’enfant enivré de lui-même », Le Monde, 21 juillet 1984.
- 12Georges Lavaudant, « Entretien avec Georges Lavaudant. “Mettre en scène Richard III”», dans Jean Fuzier (dir.), Société Française Shakespeare. Lieu et temps : actes du Congrès 1984, Montpellier, Imprimerie de recherche-Université Paul-Valéry, 1989, p. 168.
- 13Georges Lavaudant, « Mettre en Scène Richard III. Entretien avec Jean-Michel Déprats », dans Dominique Goy-Blanquet, Richard Marienstras, (dir.) Le Tyran. Shakespeare contre Richard III, Amiens, CERLA, 1990, p. 163.
- 14Ibid., p. 165.
- 15Pierre Jamet, « Immanence et formes enchâssées (Shakespeare à la lumière de Nietzsche) », Philosophique, 16 | 2013, [En ligne] http://journals.openedition.org/philosophique/814 [Site consulté le 05 avril 2018].
- 16Linda Charnes, « From Belaboring the Obvious : Reading the Monstrous Body in King Richard III », dans Thomas Cartelli (dir.), Richard III Authoritative Text, Contexts, Criticism, New York, W. W. Norton & Company, 2009, p. 345.
- 17Michel de Montaigne, Essais, II, 31, vol. 2, Paris, Garnier Frères, 1872, p. 101.
- 18William Shakespeare, Œuvres complètes, Paris, Gallimard, 1959, p. 385.
- 19Ian Moulton, « The Unruly Masculinity Of Richard III », dans Thomas Cartelli (dir.), Richard III. Authoritative Text, Contexts, Criticism, New York, W. W. Norton & Company, 2009, p. 395 (texte original : physical deformity was also thought to cause a shift in the erotic economy of the body)
- 20Georges Lavaudant, Grands Entretiens. Mémoire du théâtre. Georges Lavaudant, art. cit.
- 21Gustav René Hocke, Labyrinthe de l’art fantastique. Le maniérisme dans l’art européen, op. cit., p. 225.
- 22Georges Lavaudant, « Mettre en Scène Richard III. Entretien avec Jean-Michel Déprats », art. cit. p. 166.
- 23Georges Banu, Les Voyages du comédien, Paris, Gallimard, 2012, p. 130.
- 24
a
b
c
Ibid. - 25Ibid., p. 137.
- 26Ariel Garcia-Valdès, « Pas la haine snob, pas le cynisme de la haine qui rampe partout, mais une haine sereine, frontale, violente, radicale – Dialogue d’acteurs », dans Yan Ciret (dir.) Archipel Lavaudant, op. cit., p. 184.
- 27Fortunato Israël, « Richard III sur la scène française », dans Dominique Goy-Blanquet, Richard Marienstras (dir.) Le Tyran. Shakespeare contre Richard III, op. cit., p. 160.
- 28Achille Bonito Oliva, L’Idéologie du traître. Art, manière, maniérisme, op. cit., p. 27.
- 29Ibid., p. 13.
- 30Georges Lavaudant, « Mettre en Scène Richard III. Entretien avec Jean-Michel Déprats », art. cit., p. 166.
- 31Ibid., p. 165.
- 32Fortunato Israël, art. cit, p. 161.
- 33Tibor Klaniczay, La Crisi del Rinascimento e il manierismo, Roma, Bulzoni, 1973.
- 34Carmelo Bene, Gilles Deleuze, Superpositions. Richard III suivi de Un manifeste de moins, Paris, Les Éditions de Minuit, 2016, p. 9.
- 35Jean-Paul Manganaro, « Carmelo Bene et Shakespeare : l'humour du tragique » dans Myriam Tanant (dir.) Le Personnage tragique. Littérature, théâtre et opéra italiens, Arzanà 14, 2012, p. 203-215.
- 36Carmelo Bene, Gilles Deleuze, op. cit., p. 91.
- 37Ibid., p. 111.
- 38Ibid.
- 39Ibid., p. 119.
- 40Georges Lavaudant, Grands Entretiens. Mémoire du théâtre. Georges Lavaudant. art. cit.
- 41Mohammad Kowsar, « Deleuze on Theatre : A Case Study of Carmelo Bene's ‘Richard III. » dans Theatre Journal, vol. 38, n° 1, 1986, p. 19-33 Texte original : « […] the constituent éléments that must be put togheter for the deployment of the erotic power ».
- 42Georges Lavaudant, « Mettre en Scène Richard III. Entretien avec Jean-Michel Déprats », art. cit., p. 167.
- 43Georges Lavaudant, « Entretien avec Georges Lavaudant. “Mettre en scène Richard III”», art. cit., p. 164.
- 44Laetitia Coussement, « Richard III De Raoul Ruiz : Entre Difformités Et Déformations », Actes des Congrès de la Société Française Shakespeare, 16 | 1998.
- 45Didier Plassard, « Récriture et modélisation de l’écran par la scène : les films de théâtre de Raoul Ruiz », dans Michel Collomb (dir.), Figures de l'hétérogène : actes du XXVIIe Congrès de la Société française de littérature générale et comparée, Montpellier, Université Paul-Valéry, 1998, p. 238.
- 46Christine Hamon-Siréjols, « De “Palazzo mentale” à “Richard III”. Deux expériences de théâtre filmé » dans Béatrice Picon-Vallin (dir.), Le Film de théâtre, Paris, CNRS, 1997, p. 71.
- 47Ruiz Raul, « Richard III ou le vertige du pouvoir (à propos de l’adaptation cinématographique et baroque d’une mise en scène de G.L. » propos recueilli par Bernadette Vignac, dans Yan Ciret (dir.) Archipel Lavaudant, op. cit., p. 214.