Contre ou au-delà du roman graphique ? La bande dessinée contemporaine face à ses délimitations

Côme Martin

19/11/2016

Définir ce qu’est un roman graphique s’avère, en 2016, une tâche tout aussi ardue (sinon impossible) que de définir ce qu’est ou n’est pas la bande dessinée. Thierry Groensteen l’exprime clairement dans sa note sur le sujet pour le site Neuvième art : « Le graphic novel cesse très vite d’obéir à une quelconque définition stable. Les dimensions des livres varient, l’impression en noir et blanc n’est pas un critère, le genre pas davantage puisque les super-héros ne tardent pas à investir le nouveau format […] Face à cet éparpillement, il est plus difficile que jamais de dire ce qui relève proprement du “roman graphique”. Dans une acception large, tout ce qui se situe entre l’album grand format traditionnel et le format poche peut sembler en relever1
 ». L’on trouve aujourd’hui les termes « roman graphique » accolés à toutes sortes d’œuvres que bien peu de choses, même pas leur format, rassemble : ainsi la récente application pour écran tactile Phallaina, dessinée par Marietta Ren, se voit-elle qualifiée de « roman graphique numérique » dans son dossier de presse. Comme l’écrit Jean-Mattieu Méon, « l’expression “graphic novel” a une portée heuristique limitée : la diversité de ses usages, la grande variété des œuvres auxquelles elle est appliquée empêche de la considérer comme recouvrant une réalité artistique et/ou éditoriale cohérente2
 ». La saturation du marché par des productions désireuses de se réclamer de la légitimité attachée au roman graphique semble l’avoir vidé de toute spécificité, d’autant plus en France où les formes précédentes de bande dessinée ont depuis au moins les années 1970 cultivé une grande diversité de formats et de récits.

Il est en effet nécessaire de distinguer la forme anglophone, le graphic novel, du roman graphique francophone, pour replacer ces termes dans les contextes éditoriaux qui les ont vus naître. En effet, écrit Jan Baetens, « du côté français, la différence entre roman graphique et bande dessinée est plus discutable encore, vu la diversité de la production “traditionnelle”, ouverte dès les années 70 à toutes sortes d’expériences et d’innovations que l’on aurait pu ranger à l’intérieur du roman graphique si une telle étiquette n’avait pas fait totalement défaut3
 ». Parmi ces innovations, l’on peut citer entre autres la collection (À Suivre) de Casterman, lancée suite à la parution de La Ballade de la mer salée d’Hugo Pratt (1975), ou la collection Autodafé lancée par les Humanoïdes Associés en 1982 qui, sur chaque quatrième de couverture, se définit comme « un concept inédit entre roman et BD. Rendant toute la liberté aux créateurs, bannissant les frontières entre images et mots, c’est un format unique, une nouvelle dimension dans l’art de raconter ». Pour Jean-Matthieu Méon, « la présence, au sein du catalogue d’Autodafé, de deux des prétendants américains à une définition précoce du format (Eisner et Steranko) n’est pas une coïncidence. En effet, c’est l’ensemble du projet éditorial et des choix d’impression qui représentent une première esquisse des romans graphiques modernes4
 ».

Dans les années 1990, ce sont les éditeurs dits indépendants ou alternatifs comme l’Association ou Cornélius qui systématisent la publication d’épais volumes en noir et blanc, pas encore qualifiés de romans graphiques mais revendiquant clairement une certaine idée de la bande dessinée d’auteur. Suite à d’importants succès commerciaux, écrit Groensteen, en premier chef desquels Persépolis de Marjane Satrapi (2000-2003), « les grandes maisons d’édition ont repris à leur compte ces formes nouvelles en créant des collections ad hoc sur le même modèle (parmi les premières : “Roman BD” chez Dargaud, “Encrage” chez Delcourt, “Tohu-Bohu” aux Humanoïdes Associés et “Romans graphiques” au Seuil, puis “Écritures” chez Casterman)5
».

Le roman graphique s’impose donc aujourd’hui comme forme hégémonique, et s’il y a bien une caractéristique qui permet de le délimiter, c’est son attachement à une certaine littérarité, qui permettrait de tirer la bande dessinée vers le champ de la littérature. En effet, poursuit Groensteen, « la catégorie du “roman graphique” recompose le champ éditorial en introduisant une distinction entre le tout-venant de la production et des œuvres plus ambitieuses. Elle cherche à séduire un public (et des médias) qui n’avaient pas nécessairement l’habitude de considérer la bande dessinée comme une littérature à part entière6
». Cette littérarité, pour Jan Baetens, tente de s’imposer « sui generis », comme une forme « qui n’a plus besoin de base ou d’intertexte littéraire pour se faire accepter comme un texte littéraire proprement dit7
». C’est une « littérarité narrative et non pas verbale8
», c’est-à-dire qu’elle ne renie pas la forte composante visuelle du médium, bien qu’elle tende à l’enfermer dans un rapport d’analogie à un autre genre (le roman littéraire) sans ménager de place pour les productions qui ne s’inscriraient pas dans cette comparaison.

Ce sont précisément ces productions qui ne se réclament pas du roman graphique que nous souhaitons analyser ici. En effet, et malgré la domination dans le champ médiatique et critique du roman graphique, l’on note depuis plusieurs années l’apparition d’autres formes de bande dessinée qui, sans nécessairement se positionner explicitement contre le roman graphique, s’en écartent pour explorer d’autres pistes. « C’est signe que les choses avancent », écrit Jacques Dürrenmatt, « de voir les auteurs actuels s’en remettre à d’autres modes d’organisation [que le chapitre] et ne plus éprouver le besoin d’user d’indices romanesques. Le “roman graphique” était une étape et la bande dessinée a désormais bien d’autres cartes à jouer9
».

Sans avoir la prétention d’offrir un aperçu exhaustif de ces « autres cartes », il est cependant nécessaire pour nous de prendre la suite des nombreux articles et ouvrages recensant la généalogie du roman graphique et du graphic novel, les formes qui l’ont précédé10
, et de s’intéresser aux formes qui y succèdent ou qui dessinent une descendance possible. Si, comme nous le verrons dans un premier temps, d’autres assujettissements sont fréquents, en premier lieu desquels un lien aux arts visuels, les bandes dessinées d’aujourd’hui vont tout autant chercher à remettre en jeu leur matérialité ou leurs modalités de lecture ; profitant de la brèche ouverte par le roman graphique, les œuvres contemporaines se permettent une diversité de formes qui les place à la fois dans la rupture et la continuité de la forme qui les a précédées et domine le marché depuis plus d’une décennie.

 

1. La bande dessinée du côté des arts visuels

 

Se positionner hors du chemin tracé par le roman graphique semble nécessairement devoir se réaliser par un inintérêt, voire un déni de ce qui peut faire la littérarité d’une bande dessinée ; pour cela, la solution la plus radicale (mais aussi, peut-être, la plus simple) est de se tourner vers les arts visuels au lieu de la littérature.

Les rapports entre bande dessinée et art contemporain sont nombreux et déjà anciens : la planche d’album comme œuvre accrochable dans un musée est un concept entériné depuis l’exposition de 1967 Bande dessinée et figuration narrative. Si elle était alors montrée en comparaison avec des œuvres d’art plastique (comme cela est encore fréquemment le cas, par exemple en 2009 à l’exposition Vraoum ! à la Maison rouge à Paris), depuis plus de dix ans plusieurs dessinateurs sont également représentés en galerie, tels Killoffer, Stéphane Blanquet ou Jochen Gerner à la galerie Anne Barrault, qu’il s’agisse d’exposer des planches d’album ou des œuvres inédites.

Parmi ces exemples, le cas de Jochen Gerner est particulièrement intéressant parce que l’auteur rassemble fréquemment en livres des œuvres d’abord exposées en galerie : c’est ainsi le cas de Panorama du feu (2010), Panorama du froid (2013) ou encore Abstraction (1941-1968) (2012). Si Gerner se tourne davantage vers les arts visuels que vers la littérature, il n’en rejette pas pour autant l’objet livre, une stratégie, on le verra, partagée par l’ensemble des autres œuvres analysées dans cet article. Les recueils tirés de ses expositions, qui n’en constituent pas pour autant les catalogues, semblent incarner ce que Thierry Groensteen appelle le « devenir art contemporain », en opposition au « devenir littéraire » du roman graphique : un « devenir art contemporain » qui permettrait de « revivifier au passage la tradition du livre d’artiste11
», et donc l’attachement à la matérialité du livre.

L’intérêt de l’œuvre de Gerner est également son rejet, cette fois-ci patent, non seulement de la littérarité mais aussi de la narrativité. En cela ses planches, même exposées dans un contexte muséal, s’éloignent radicalement de la majorité des expositions de bande dessinée qui se contentent le plus souvent de présenter des planches originales détachées de leur contexte narratif. La production de Gerner se rapproche plus volontiers de la bande dessinée abstraite telle qu’elle est définie par Jan Baetens, définition qu’il n’est pas inutile de rappeler ici. Baetens, dans son article « Abstraction in Comics », distingue avec finesse la bande dessinée abstraite d’autres formes d’abstraction (musicales ou artistiques) en ce sens qu’elle autorise la figuration ; en effet, écrit Baetens, si

à un premier niveau, celle de l’image elle-même (ou celle de la case, si l’on préfère), il est possible d’affirmer que l’abstraction est l’opposé de la figuration […] à un second niveau, plus important (celui du récit), les choses changent et l’abstraction n’est alors plus l’opposé de la figuration, mais de la narration. Au niveau narratif, ce qui établit l’écart entre abstrait et non-abstrait n’est pas la présence ou l’absence d’éléments figuratifs, mais l’absence ou la présence de potentiel narratif. À ce second niveau, l’abstraction signifie l’absence de sens narratif, et cette absence, lorsque l’on parle des contenus de l’image, peut comprendre à la fois les représentations abstraites et figuratives. Dans ce contexte, “abstrait” ne signifie plus “non figuratif” : cela signifie non-narratif, et même des éléments figuratifs peuvent devenir abstraits si leur fonction narrative cesse d’être évidente12
».

En effet, pour Baetens l’abstraction est un concept qui se construit plus qu’il n’est intrinsèquement13
, tant le lecteur est prompt à recomposer un récit même là où il n’y en avait pas à l’origine14
. Cette définition signifie donc que la bande dessinée abstraite vient précisément attaquer l’une des caractéristiques majeures du roman graphique (sa narration riche) en laissant intactes ses qualités picturales.

Il est en outre important de distinguer, comme le fait Groensteen à propos du recueil Abstract Comics Anthology d’Andrei Molotiu (paru en 2009), les « bandes dessinées abstraites » — que Groensteen définit, de manière vague, comme « des séquences de dessins abstraits » — des « bandes dessinées infranarratives », « des séquences de dessins qui contiennent des éléments figuratifs mais dont la juxtaposition ne produit pas de narration15
». Ainsi chaque image conserve son potentiel narratif, mais ce potentiel ne s’additionne pas pour former un récit global et cohérent. Cela permet de percevoir une planche de bande dessinée abstraite « aussi bien […] sur le mode du tableau c’est-à-dire comme une image globale, traversée par un réseau de lignes orthogonales (à la Mondrian). En ce cas, les rapports entre les zones (on évitera de parler encore de vignettes) sont de simples rapports spatiaux produisant un effet de champ », que par un « déchiffrement linéaire, c’est-à-dire une lecture, même s’il est d’emblée évident que les images, ici, ne représentent et, partant, ne racontent rien, si tant est que le dispositif est reconnu comme typique de la bande dessinée16
».

Dans le domaine francophone, des exemples antérieurs à 2009 existent, comme la rubrique récurrente de la revue Bile noire de l’éditeur suisse Atrabile (entre 2003 et 2007) ou le livre Bleu de Lewis Trondheim (2006). Mais si nous avons retenu comme exemple principal le travail de Jochen Gerner, c’est parce qu’il découle d’un procédé systématique de transformation de bandes dessinées pré-existantes17
; en d’autres termes, un travail d’abstraction de récits tout à fait conventionnels. En effet, comme le précise Christophe Gallois, les planches d’Abstraction (1941-1968) sont « basées sur une bande dessinée anonyme publiée en 1968 au sein de la revue Navy, récit d’une bataille navale située pendant la Seconde Guerre mondiale. Des images qui composent ce fascicule – pour la plupart, donc, des scènes d’action en mer –, n’ont été conservés que les motifs graphiques – traits, ronds, points, hachures, etc. –, qui s’apparentent désormais à des compostions abstraites. […] “Parfois, on voit un fantôme de l’image précédente”, précise [Gerner]18
». Ce qui est à l’œuvre chez Gerner est en effet cette superposition de couches et, partant, cette interrogation de la tension entre narration et abstraction, soulignée par la reproduction, en épigraphe du livre, du texte du premier cartouche de la bande dessinée source. « Sans cette introduction », écrit Jean-Charles Andrieu de Levis, « le lecteur assisterait à une bataille anonyme dans un contexte arbitraire choisi par lui-même. Si cette introduction permet de bien visualiser un combat de la seconde guerre mondiale, elle n’est pas indispensable au fonctionnement du récit, mais rend sa lecture plus dirigée19
». Par cette direction, les images de Gerner continuent d’être « travaillée[s] par du récit de manière plus ou moins souterraine20
» ; sans aller jusqu’à la littérarité du roman graphique, elles en côtoient l’intention pour mieux tirer le propos du côté du dessin. « Je kidnappe le passé pour explorer le futur », déclare Gerner dans un entretien avec Tom McCarthy21
; un futur de potentialités pour la bande dessinée qui n’exclut ni la force du récit, ni celle du graphisme.

L’autre tension explorée par Gerner est celle entre l’œuvre comme série de tableaux et comme série de planches. En effet, alors que les planches d’Abstraction étaient originellement exposées, elles sont ici « réorganisées, ordonnées en un livre relié dans lequel elles se font désormais face. Elles adoptent ainsi une logique de lecture22
». Gerner, qui de son aveu même s’intéresse « plus qu’à l’original, vraiment au support livre, au support imprimé23
» partage en ce sens avec le roman graphique, ainsi qu’avec nos autres exemples, l’idée du livre comme unité, pour reprendre les propos de Jan Baetens24
. C’est cette unité du volume qui permet de remettre au centre du propos sa matérialité.

 

2. La bande dessinée face à sa matérialité

 

Considérer le livre de bande dessinée comme unité, c’est aller du côté de ce qu’Henri Meschonnic appelle en poésie la forme-sens : « Seule une conception de l’œuvre comme écriture, non ornement, peut se garder du vieux dualisme du “fond” et de la “forme” et montrer l’œuvre comme forme-sens – rhétorique traversée prenant le nouveau visage d’un style25
». Le livre ne peut plus être un espace neutre, et devient nécessairement un « objet total », pour utiliser les termes de Carl Malmgren26
. Il a une existence spatiale, qui remet également en jeu (dans tous les sens du terme) l’acte de lecture lui-même, poussant le lecteur, dans la tradition postmoderniste, à manipuler le récit tout autant que ce dernier le manipule. Nous pensons ici, bien évidemment, aux œuvres de Chris Ware comme exemples d’objets où tout, des dimensions des livres au grammage du papier, est réfléchi pour faire écho, voire sens, avec le récit proposé. D’autres expérimentations, rendues possibles par les avancées techniques en matière de conception et d’impression, existent ; ainsi Thomas & Manon (2015) de Alex Chauvrel et Rémi Farnos, dont rien n’indique de prime abord qu’il s’agisse d’une bande dessinée si ce n’est la mention discrète des Éditions Polystyrène sur l’une des faces du cube que constitue l’objet (on ne peut guère continuer à le qualifier de livre). Les objets littéraires ou dessinés cubiques sont rares : en bande dessinée, on peut citer Un fanzine carré numéro C (2013) et Le pavé de Paris d’Emmanuel Guibert (2004), qui demeurent des livres à feuilleter, tandis que Thomas & Manon est davantage destiné à s’étaler. En effet, le récit se présente ici sous la forme de 200 tuiles qui sont autant de cases que le lecteur peut agencer à loisir, permutant les strips potentiels en quête de sens. La lecture cesse alors de s’envisager comme l’exploration d’une série de couches sédimenteuses ou d’un « multicadre feuilleté27
», et s’aborde, par l’assemblage des cases, comme une exploration en mouvement, une cartographie éphémère, rappelant en cela les observations de Marie-Claire Ropars-Wuilleumier à propos de la circulation dans un texte comme acte spatial : « Le point central est de dispersion, le volume se fait mouvement, la région appartient à l’errance, et la place se trouve soumise au déplacement incessant de ses coordonnées28
». Le récit continue d’être une unité, mais ce n’est plus celle du livre à laquelle se rattache le roman graphique : au contraire, Thomas & Manon se présente au premier abord comme un volume inhabituel (car ne correspondant pas aux dimensions conventionnelles d’une bande dessinée) pour mieux déjouer les attentes de ses lecteurs en insistant sur la surface plane que représentent ses tuiles. À cette bidimensionnalité répond la possibilité d’une lecture forcément renouvelée à chaque ouverture du cube, une façon peut-être de rappeler que le numérique n’a pas la primauté du récit instable.

Là où la manipulation de l’objet Thomas & Manon appelle à la relecture, celle de Un cadeau (2013), de Florent Ruppert et Jérome Mulot, refuse même une seconde lecture de l’ouvrage. Ruppert et Mulot, qui publient quasi-systématiquement en duo, interrogent dans leur œuvre à la fois le format de la bande dessinée – de l’album aux dimensions plus ou moins standards au petit format, en passant par la bande dessinée sous forme de journal – et sa matérialité depuis leurs débuts. Le récit d’Un cadeau se déroule dans une salle d’autopsie : l’ouvrage se présente comme une succession de couches de papier plutôt que de pages, que le lecteur doit inciser et ouvrir pour progresser dans sa lecture, imitant ainsi les gestes des deux protagonistes du récit. « Le livre est un objet vivant », rappellent les auteurs dans un entretien29
: ici, il serait plutôt question de sa mise à mort, en tout cas en tant que succession de pages. Comme avec Thomas & Manon, c’est le principe même de livre qui est remis en question, un peu plus violemment par Ruppert et Mulot que par Chauvrel et Farnos. Dans Un cadeau, la forme épouse une fois de plus le sens, faisant du livre un objet fragile qu’il ne faut pas hésiter à attaquer, tant « lire, c’est devoir tailler dans le vif », comme l’écrit Christian Rosset30
.

La deuxième force de Un cadeau, au-delà de sa proposition de lecture en forme de blague potache, est d’offrir une lecture en profondeur qui laisse les strates précédentes toujours visibles, venant là aussi rappeler l’importance du volume d’un livre, même peu épais, dans le processus de dissection d’une œuvre. « Ce qui aura marqué le tournant du XIXe et du XXe siècle », écrit Tristan Garcia, « ça aura été la remise à plat du texte avec l’image – l’affiche, la feuille de journal, l’enseigne publicitaire, la poésie d’avant-garde… Ce qui marque le passage du XXe au XXIe siècle, c’est la projection de ces images dans le fantasme de la tridimensionnalité31
». On dépasse ici « l’effet de surface32
» habituellement présent en bande dessinée ou dans d’autres médiums faisant appel à l’image (notamment en photographie) pour, à l’instar de Jonathan Safran Foer avec son ouvrage Tree of Codes (2010), offrir au lecteur un vrai relief en creux qui permet de (se) plonger littéralement dans le livre.

On voit aisément la tendance qui se dégage, avec ces deux ouvrages, du jeu avec la matérialité : insister sur celle-ci, c’est aussi appeler à une plus grande immersion dans le récit, via l’interaction avec l’objet. On n’est jamais très loin de la « lecture comme jeu », pour reprendre le titre de l’ouvrage célèbre de Michel Picard33
, et ce basculement vers le ludique est tout à fait concrétisé dans une bande dessinée comme Vanille ou chocolat ? (2012) du dessinateur américain Jason Shiga34
. L’album, pourvu d’un mode d’emploi, se présente explicitement comme ludique. Son protagoniste, Jimmy, rencontre en effet un savant qui lui propose de tester ses inventions, lui permettant de voyager dans le temps ou de contrôler l’entropie en créant des univers parallèles. Là encore, le lecteur est soumis aux mêmes choix que Jimmy, et doit naviguer à travers un complexe système d’onglets et de connecteurs pour parvenir jusqu’à l’une des fins que propose le récit. L’ordre de lecture n’est donc pas fixe puisque, comme le revendique la couverture de l’ouvrage, « 3856 possibilités narratives » s’offrent au lecteur, et que l’ordonnancement des cases ne suit que rarement le sens occidental conventionnel.

Il est donc possible de gagner ou de perdre dans Vanille ou chocolat ?, un livre qui comporte également des codes qui permettent de débloquer certaines possibilités narratives. Impossible de lire cette œuvre OuBaPienne par feuilletage : à la manière des univers parallèles imaginés par le Professeur K., de nombreuses doubles pages présentent plusieurs variantes d’un même événement, voire se répètent entièrement, dans une tentative de décourager toute tentative de triche (pour prolonger l’analogie avec le jeu de société). Par ailleurs, deux doubles pages sont accessibles seulement par feuilletage, contribuant à accentuer la tension qui existe dans Vanille ou chocolat ? entre deux modes de lecture irréconciliables.

Interactif par nature, l’album de Shiga présente une forme qui ne ressemble à aucune autre dans sa matérialité. Vanille ou chocolat se détache presque entièrement des codes de la bande dessinée conventionnelle (sens de lecture, cases consécutives, etc.) : modèle de récit pluri-narratif, il nous permet d’envisager une troisième façon de s’éloigner du modèle du roman graphique, et n’est pas le seul à emprunter cette voie.

 

3. De nouvelles modalités de lecture

 

La pluri-narration telle qu’elle est présente dans Vanille ou chocolat peut se considérer, en bande dessinée, comme une variante à grande échelle de la pluri-lecturabilité, contrainte OuBaPienne définie ainsi par Thierry Groensteen : « Une idée simple : un dessin n’a pas besoin d’être répété pour être vu ou lu plusieurs fois. Il suffit que le lecteur soit invité à suivre des yeux un parcours qui l’amène à passer plus d’une fois par la même vignette, ou que plusieurs parcours concurrents lui soient proposés, une même vignette participant alors de différentes séquences et s’offrant à autant de lectures35
».

S’inspirant des travaux de l’OuLiPo sur la littérature combinatoire36
, l’OuBaPo s’est naturellement intéressé assez rapidement aux façons d’arranger autrement les cases sur la planche que par un enchaînement linéaire ; parce que la notion de mise en page constitue l’un des piliers de l’écriture graphique, il était nécessaire pour l’OuBaPo de la remettre en question.

Groensteen, après cette première définition de la pluri-lecturabilité, a élargi la question en préférant à ce premier terme, dans un ouvrage paru en 2011, celui de plurilinéarité ou « récit bifurquant ». La pluri-lecturabilité correspond à des exemples comme l’acrostrip (on peut lire une série de strips horizontalement ou verticalement), la bande dessinée palindrome (chaque case est répétée symétriquement à partir de l’apparition d’une case centrale), ou encore les bandes dessinées dans lesquelles il y aurait, physiquement, un trou dans l’album, qui amènerait le lecteur à lire deux fois la (les) même(s) case(s). La contrainte de pluri-lecturabilité peut donc ne concerner qu’une case, et ne remettre en jeu qu’un seul passage de lecture, là ou la plurilinéarité concerne un récit entier. Ce qui est dès lors en jeu, c’est bien « la notion de page » telle que la définit Groensteen : « À l’intérieur d’une page, le parcours de lecture proposé ne peut mener que d’un point déterminé à un autre point déterminé. L’introduction de la plurilinéarité, c’est-à-dire de chemins qui se croisent, libère l’opération du découpage de l’interaction étroite qu’il entretient ordinairement avec la mise en page. Toute l’économie du système spatio-topique s’en trouve bouleversée37
».

Cependant, le terme « plurilinéarité » nous semble trop restreint puisqu’il met en avant cette notion de linéarité qui est battue en brèche, par exemple, dans Vanille ou chocolat ?. Par ailleurs, comme le note Ann Miller, « la potentialité de la bande dessinée à encourager la prise de conscience des relations non-linéaires est découragée lorsque le lecteur est incité à suivre une série de connections linéaires, la plupart du temps assurées par la continuité (relativement ténue) du dialogue, les images étant réduites à une fonction illustratives38
». Ériger la linéarité au rang de principe, c’est encore et toujours encourager une certaine conception du récit qui, malgré ses atours expérimentaux, ne s’éloigne guère de la littérarité prônée par le roman graphique. Il est donc préférable d’y préférer le terme « plurinarration », qui permet d’aller plus loin et d’examiner des récits labyrinthiques (comme celui de Shiga), ou cycliques, comme ceux de Leif Tande et Ray Fawkes.

Morlac, de Leif Tande (2005), est un exemple intéressant à plus d’un titre, à commencer par son absence de texte qui nous autorise à minimiser les critiques d’Ann Miller sur les récits bifurquants. D’autre part, son récit, relativement sobre – un homme en costume et portant une mallette déambule dans un bâtiment – nous permet de nous concentrer sur sa mécanique de mise en page. Les cases de Morlac, à première vue, ne répondent pas à un principe de séquentialité (l’action débutée dans une case se prolonge dans la suivante selon l’ordre de lecture occidental) mais de superposition : l’action débutée dans une case se prolonge dans la case occupant les mêmes coordonnées spatiales sur la page suivante. Ce principe déjà déroutant se complexifie lorsque l’on comprend, à l’instar de Xavier Guilbert, que Tande « utilise la “grille” de trois cases par quatre d’une page comme autant d’univers parallèles […] permettant à certains de ses personnages de descendre d’un étage, de passer d’une case-couloir à l’autre, voire même de se croiser [soi-même] dans un jeu de paradoxes réjouissant39
». Morlac met volontairement à mal le principe de coordination espace-temps qui régit la plupart des bandes dessinées, faisant de ses cases des lieux fixes, comme l’écrit Jean-Michel Berthiaume : « Le personnage escalade les gouttières afin de passer d’une case à l’autre. Par conséquent, l’espace auparavant virtuel de la gouttière devient tangible. La gouttière devient simultanément un lieu et un non-lieu dans la bande dessinée, offrant donc un paradoxe fort riche à l’exploitation40
». Le titre du récit, enfin, nous éclaire – comme dans le cas des œuvres abstraites – sur sa volonté d’abolir toute linéarité : il dérive en effet de la contrainte OuBaPienne du « Morlaque », c’est-à-dire des récits qui se « mordent la queue » (inspiré de la contrainte OuLiPienne des cylindres41
). Il n’y a pas d’autre issue au récit que son recommencement, et l’on comprend alors pourquoi il est nécessaire à Morlac de revêtir les atours formels d’un album conventionnel : la surprise n’en est que plus grande lorsque l’on comprend être en face d’un récit qui ne répond à presque aucun code connu de la bande dessinée.

Il convient cependant d’observer, avec Xavier Guilbert, que les cases Morlac ont une « tendance répétée […] à entrer “en résonnance” les unes avec les autres42
» : ramenant ponctuellement l’attention du lecteur à l’organisation de la planche, Tande s’amuse ponctuellement à faire coïncider des motifs visuels (comme un gros plan sur un visage) dans toutes les cases d’une même page. C’est la même tension, de façon beaucoup plus systématique, qui habite également One Soul de Ray Fawkes (2011), qualifié de « graphic novel » sur son quatrième de couverture et en reprenant les codes, y compris l’ambition littéraire. One Soul, dont les huit premières planches évoquent la bande dessinée abstraite, peut en effet se lire de deux façons : conventionnellement, en lisant une case après l’autre, ce qui révèle de nombreux jeux de symétrie (visuels comme verbaux), chaque double page étant mathématiquement divisée en dix-huit cases de même taille qui présentent dix-huit vies différentes à la même période de développement (naissance, enfance, adolescence, âge adulte, vieillesse, mort). Ces vies se répondent mais s’effleurent seulement, et il apparaît vite, sans que rien ne l’indique, que relire One Soul de la même manière que Morlac est essentiel pour saisir les subtilités du (ou des) récit(s). C’est là encore le titre de l’ouvrage qui en fournit la clef : ces dix-huit vies sont en réalité différentes incarnations d’une même âme à travers les âges, un récit à la fois unique et multiple.

Comme l’écrit Tamryn Bennet à propos des bandes dessinées poétiques, « One Soul révèle que les interprétations linéaires conventionnelles ne sont pas négatives, elles sont simplement trop étroites pour contenir toutes les formes de bandes dessinées, y compris les œuvres poétiques, multi-séquentielles et non-linéaires, en particulier celles qui ôtent les structures de case et de grille. À l’opposé, la segmentivité ne limite pas la poésie ou la bande dessinée à des formes purement linéaires ou non-linéaires, et ne suggère pas non plus que la poésie est ce qui permet à la bande dessinée de s’échapper des contraintes linéaires ou narratives. Elle démontre plutôt que considérer la bande dessinée par le biais de la segmentivité nous permet d’analyser des composants individuels sous diverses combinaisons, qu’elles soient linéaires, non-linéaires, multi-linéaires, abstraites, narratives ou non-narratives43
». La segmentivité, y compris dans une œuvre relativement conventionnelle dans son format et sa présentation, peut être utilisée à des fins poétiques qui démultiplient les potentialités narratives de la bande dessinée. Elle permet d’évoluer depuis une lecture linéaire de l’œuvre vers une lecture tabulaire, telle qu’elle est définie par Christian Vandendorpe : « La tabularité désigne tout ce qui rompt la linéarité du prélèvement d’indices que le lecteur effectue en cours de lecture ; elle consiste à faire intervenir dans l’établissement de la signification des informations puisées à divers niveaux de la matérialité du texte ou à des textes parallèles44
». Outre la transformation du récit en un espace non nécessairement chronologique, la lecture tabulaire « s’oppose à une lecture linéaire en ceci qu’elle est le résultat de cette dernière et de la relecture45
». En d’autres termes, la tabularité va de pair avec la relecture, et c’est bien ce à quoi nous incite One Soul, œuvre chorale qui ne livre ses subtilités qu’après plusieurs parcours attentifs à travers ses pages.

 

L’ouvrage de Ray Fawkes le prouve : si d’autres formes de bande dessinée s’organisent aujourd’hui bien loin des codes érigés par le roman graphique, qu’il s’agisse de réduire à sa plus simple expression la notion de récit ou de remettre en question les caractéristiques formelles de la bande dessinée que l’on pourrait tenir pour acquises, il est tout autant possible d’innover en restant à l’intérieur de catégories prédéfinies.

Les exemples développés dans cet article (auxquels nous aurions pu ajouter bien d’autres ouvrages, comme la production du FRMK46
) montrent, d’une part, que le roman graphique n’est pas exactement aujourd’hui un lieu d’avant-garde pour la bande dessinée. Il l’a été, lorsqu’il ne portait pas encore ce nom, jusqu’aux années 1990, mais il est raisonnable de penser que la récupération, par les gros éditeurs, du format et du contenu développé par les maisons d’éditions indépendantes, a nécessairement limité les terrains d’expérimentation. La situation est parfaitement résumée par Éric Maigret : « Le roman graphique devient une position avancée en territoire anciennement ennemi […] L’exemple le plus récent et probablement le plus spectaculaire est fourni par Asterios Polyp de David Mazzuchelli […] L’ouvrage, acclamé par la presse et volontiers considéré comme “arty”, brise de nombreux codes narratifs et graphiques […] Là où cette avancée formelle devrait mener à un hermétisme, dans un schéma distinctif classique, elle révèle la grande valeur (hiérarchie intra-genre) d’un auteur qui ne renonce pas dans son discours comme dans son œuvre à viser le grand public47
». Une œuvre comme Asterios Polyp représente l’extrémité du territoire couvert par le roman graphique : la libération du format et des formes par rapport à l’album franco-belge ou le comics américain permet à Mazzuchelli de s’aventurer au-delà de ses productions précédentes, mais elle contraint dans le même temps le roman graphique à ne pas dépasser les barrières de ce qui peut être « acclamé par la presse », tant les considérations économiques jouent un rôle important dans l’affaire.

D’autre part, des œuvres comme Abstraction (1941-1968), Thomas & Manon ou Morlac démontrent la nécessité de ne considérer le roman graphique que comme l’une des extensions possibles de la bande dessinée, aujourd’hui majoritaire en termes de nombre d’ouvrages mais nullement en termes d’importance. Il est crucial d’accorder la place qui convient à ces œuvres qui forcent la critique et la recherche à reconsidérer ce que l’on entend par « bande dessinée », et montrent que l’avant-garde est toujours présente dans ce champ : elle s’est simplement déplacée vers d’autres lieux.

 

(Université Paris-Sorbonne)

 

 

Notes et références

  • 1Thierry Groensteen, « Roman graphique », Neuvième art, septembre 2012, en ligne : http://neuviemeart.citebd.org/spip.php?article448 (consulté le 25 juin 2016).
  • 2Jean-Matthieu Méon, « Introduire le “graphic novel” », communication au sein du congrès international de l’AFEA, 26 mai 2016 (texte communiqué par l’auteur).
  • 3Jan Baetens, « Le roman graphique », La Bande dessinée. Une médiaculture, Éric Maigret et Matteo Stefanelli (éd.), Paris, Armand Collin, 2012, p. 203.
  • 4Jean-Matthieu Méon, « Of Fumetti and Graphic Novels », Studies in Comics 4.1 (2013), p. 128 (notre traduction).
  • 5Thierry Groensteen, « Roman graphique », art. cit.
  • 6Idem.
  • 7Jan Baetens, « Le roman graphique », art. cit., p. 209.
  • 8Ibid., p. 212.
  • 9Jacques Dürrenmatt, Bande dessinée et littérature, Paris, Classiques Garnier, 2013, p. 113.
  • 10Voir, par exemple, The Graphic Novel. An Introduction de Jan Baetens et Hugo Frey (Cambridge University Press, 2014).
  • 11Thierry Groensteen, Bande dessinée et narration, Paris, Presses Universitaires de France, 2011, p. 196.
  • 12Jan Baetens, « Abstraction in Comics », SubStance 40.1 (2011), p. 96 (notre traduction).
  • 13Ibid., p. 107.
  • 14Ibid., p. 108.
  • 15Thierry Groensteen, Bande dessinée et narration, op. cit., p. 8.
  • 16Ibid., p. 9.
  • 17Ainsi que d’autres sources visuelles, comme les catalogues des magasins Ikea. Rappelons que Jochen Gerner fait également partie de l’OuBaPo, ce qui explique ce goût pour les contraintes transformatives.
  • 18Christophe Gallois, « Jochen Gerner, le travail de la citation », Jochen Gerner, Paris, Éditions B42, 2015, p. 12.
  • 19Jean-Charles Andrieu de Lévis, « Abstraction (1941-1968) », du9, mars 2012, en ligne : http://www.du9.org/chronique/abstraction-1941-1968/ (consulté le 25 juin 2016).
  • 20Christian Rosset, « Recouvrir/dévoiler ou la méthode Gerner », Abstraction (1941-1968), Paris, l’Association, 2012, n. p.
  • 21Jochen Gerner et Tom McCarthy, « Ping-Pong », Jochen Gerner, op. cit., p. 12.
  • 22Jean-Charles Andrieu de Lévis, « Abstraction (1941-1968) », art. cit.
  • 23Xavier Guilbert, « Jochen Gerner », du9, février 2013, en ligne : http://www.du9.org/entretien/jochen-gerner/ (consulté le 25 juin 2016).
  • 24Jan Baetens, « Le roman graphique », art. cit., p. 213.
  • 25Henri Meschonnic, Pour la poétique I, Paris, Éditions Gallimard, 1970, pp. 20-21.
  • 26Carl Malmgren, Fictional Space in the Modernist and Postmodernist American Novel, Londres, Associated University Presses, 1985, p. 25.
  • 27Thierry Groensteen, Bande dessinée et narration, op. cit., p. 119.
  • 28Marie-Claire Ropars-Wuilleumier, Écrire l’espace, Vincennes, Presses Universitaires de Vincennes, 2012, p. 10.
  • 29Mélissa Bounoua et Amandine Schmitt, « On voulait parler de sexualité en BD sans donner envie de faire l’amour », BibliObs, 31 janvier 2014, en ligne : http://bibliobs.nouvelobs.com/angouleme-2014/20140201.OBS4684/ruppert-mulot-on-voulait-parler-de-sexualite-en-bd-sans-donner-envie-de-faire-l-amour.html (consulté le 25 juin 2016).
  • 30  Christian Rosset, Éclaircies sur le terrain vague, Paris, l’Association, 2015, p. 252.
  • 31Tristan Garcia, « Quelle est l’épaisseur d’une image ? », Transactions photolittéraires, Jean-Pierre Montier (éd.), Rennes, Presses Universitaires de Rennes, 2015, p. 269.
  • 32Ibid., p. 261.
  • 33Michel Picard, La Lecture comme jeu, Paris, Éditions de Minuit, 1986. Voir notamment pp. 190-215.
  • 34Publié aux États-Unis en 2010 sous le titre Meanwhile.
  • 35Thierry Groensteen, « Premier bouquet de contraintes », Oupus 1, Paris, l’Association, 1997, p. 26.
  • 36Voir Claude Berge, « Pour une analyse potentielle de la littérature combinatoire », Oulipo, la littérature potentielle, Paris, Éditions Gallimard, 1973, pp. 47-61.
  • 37Thierry Groensteen, Bande dessinée et narration, op. cit., p.79.
  • 38Ann Miller, « Oubapo: A Verbal/Visual Medium Is Subjected To Constraints », Word & Image XXIII/2 (2007), p. 124.
  • 39Xavier Guilbert, « Morlac », du9, avril 2006, en ligne : http://www.du9.org/chronique/morlac/ (consulté le 25 juin 2016).
  • 40Jean-Michel Berthiaume, Concaténation en continu, Montréal, Université de Concordia, 2012, p. 55.
  • 41Une application de cette contrainte est lisible dans Chamboula de Paul Fournel.
  • 42Xavier Guilbert, « Morlac », art. cit.
  • 43Tamryn Bennet, « Comics Poetry », Image [&] Narrative 15.2 (2014), p. 119 (notre traduction).
  • 44Christian Vandendorpe, « Sur l’avenir du livre : linéarité, tabularité et hypertextualité », Le livre. De Gutenberg à la carte à puce, J. Bénard et J.J. Hamm (éds.), New York, Legas, 1996, p. 151.
  • 45Groupe μ, Rhétorique de la poésie, Paris, Éditions du Seuil, 1990, p. 65.
  • 46La collection FRMK est issue du Frémok, un collectif regroupant les éditions du Fréon et d’Amok depuis 2002. Regroupant des auteurs comme Olivier Deprez, Dominique Goblet ou Vincent Fortemps, cette collection se rapproche davantage d’une forme de poésie visuelle mais trouve également des points de résonance vers la peinture, le cinéma ou la danse. Notons par ailleurs que, dans le discours du Frémok, la bande dessinée est située sur le même plan que les spectacles, installations et performances réalisées par les auteurs du collectif.
  • 47Éric Maigret, « Bande dessinée et postlégitimité », in La bande dessinée : une médiaculture, op. cit., pp. 143-144.

Site Drupal adapté par Pierre-Carl Langlais.

ISSN  2534-6431