Coécritures : interroger les disciplines

Ce premier numéro intitulé « Coécritures : interroger les disciplines » est le témoignage d’une journée d’étude éponyme qui a eu lieu le 30 janvier 2014 à l’université Paul Valéry Montpellier III. Cette dernière a réuni sept communications coécrites par des duos de chercheurs issus de disciplines différentes. Elle a été l’occasion pour chacun d’interroger sa capacité à entrer en relation avec d’autres univers disciplinaires. Une telle entreprise vise à expérimenter les possibilités d’une pensée transversale.

C’est autour d’objets d’étude spécifiques que ce numéro entend effectuer ce travail de rencontre et de confrontation des approches méthodologiques. Il a été pour cela laissé aux coauteurs le soin de choisir des œuvres invitant à une réflexion commune. Le lecteur de ce premier numéro découvrira alors des articles coécrits autour d’œuvres différentes. Ces derniers, malgré leur différence thématique, s’inscrivent tous dans la problématique de ce premier numéro : coécrire en vue de penser les lignes de fracture et les lieux d’entente entre les disciplines.

Ainsi, la rubrique À l’épreuve propose d’explorer quatre lieux possibles de rencontre. L’hybridité des séries télévisées, réunissant entre autres « effets audiovisuels » et « intertextes littéraires », a appelé Amélie Chabrier et Yoann Hervey à questionner la possibilité d’un nouage épistémologique à partir de leurs disciplines respectives : la Littérature et les Études cinématographiques.

La pluralité des productions d’artistes indisciplinés, tels que le cinéaste Abbas Kiarostami ou la « performeuse » Isabelle Duthoit, ont conduit les duos Ammar Kandeel/Fabien Meynier et Lise Guiot/Olivier Migliore à articuler leurs méthodes, et ce, en vue de mieux comprendre et interpréter la complexité qui pourrait échapper à une analyse unidisciplinaire. Quand les premiers tentent de comprendre la notion d’image dans la pensée esthétique d’Abbas Kiarostami à travers les considérations poétiques et cinématographiques du temps, les seconds allient la Musicologie et les Études théâtrales pour tenter de saisir les enjeux d’une expression vocale atypique inscrite à la frontière de la musique improvisée et du théâtre contemporain.

Les phénomènes de transfiguration, de métamorphose et de devenir d’une œuvre ont conduit Marion Rollandin et Yoan Malmont à se pencher sur le sens et les enjeux des situations de communication engendrées par la pratique du jeu vidéo en ligne League of Legends. En mettant à contribution leurs disciplines respectives, Anthropologie et Sciences de l’Information et de la Communication, les coauteurs procèdent par « alternance focale », de part et d’autre de l’écran, pour analyser et enrichir l’interprétation des « processus communicationnels » et des « actes de pratiques » propres au jeu. Enfin, Maxence Mosseron et Guillaume Ribert jettent un regard contemporain sur des œuvres anciennes. Ces derniers mènent une étude comparée de l’écoulement turbulent – phénomène physique relevant de la mécanique des fluides – et de la représentation de l’eau en mouvement chez Léonard de Vinci et Fritz Thaulow. Les coauteurs rendent possible cette rencontre entre art et science au prisme de la notion de filtre – « élément fondamental pour l’un et l’autre champ » – leur permettant d’éprouver et de travailler les frontières disciplinaires.

Ces premiers travaux témoignent, au regard de la diversité des disciplines concernées, de l’intérêt actuel pour la mise en commun des savoirs et le dépassement des appartenances disciplinaires. Les notions de « filtre », d’« image » ou d’« expression vocale » entre autres, ont permis aux chercheurs de disciplines différentes de dialoguer. La fluctuation de ces notions, résultant de l’étude d’oeuvres complexes et hétérogènes, révèlent la nécessité de questionner les possibilités et les conditions de ces glissements conceptuels entre les disciplines. La seconde rubrique de la revue, intitulée Work In Progress, présente une sélection des actes de la cinquième journée d’étude des doctorants du RIRRA 21 qui a eu lieu le jeudi 11 avril 2013. Cette journée est l’occasion pour les doctorants de développer une problématique sur un point précis de leur thèse en cours. La revue publie cette année deux articles de doctorants en Littérature française et comparée. Priscila Gimenez aborde la fictionnalisation dans les feuilletons dramatiques brésiliens de Martins Pena dans la « Semaine Lyrique » comme lieu de transfert culturel entre la France et le Brésil. Canissius Allogho, pour sa part, propose d’analyser le travail poétique et herméneutique de la mémoire critique dans L’ombre des choses à venir de Kossi Efoui à partir de la notion blanchotienne et ameisienne de « penser le manque ».

Cette brève présentation ne pourrait suffire à témoigner au lecteur la dynamique et l’enthousiasme qui animent la revue À l’épreuve. Nous vous souhaitons donc une excellente lecture et en profitons pour remercier chaleureusement tous les doctorants qui ont participé à l’élaboration de la thématique de ce premier numéro à savoir : Priscila Gimenez, Francine Ananian, Rafael Marques, Mélodie Simard-Houde, Bastien Cheval, Matis Cornet, Amélie Chabrier, Marie-Astrid Charlier, Yannick Martial, Fan Zhe, Arnold Matsala, Lise Guiot et Olivier Guttierez !

Dynamiquement,

Le comité de direction
Olivier Migliore, Ammar Kandeel et Canissius Allogho

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ISSN  2534-6431