"Sale comme une image" : couvertures, généricité et sexuation par les choix iconiques ?

La sorcellerie de la frontière est sans âge parce qu’il n’y a pas trente-six manières de transformer un tas en tout.

Régis Debray, Éloge des frontières.

 

 

Comme nous invitent à le constater tant Jean-Marie Schaeffer dans Qu’est-ce qu’un genre littéraire ? que Gérard Genette dans Seuils, la légitimité générique d’une œuvre, « ressentie » par le lecteur et/ou le spectateur, émane d’une collection variable de signes (graphiques, picturaux, éditoriaux, auctoriaux…) qui informent le récepteur sur ce qui l’attend et impliquent de la part de l’auteur le respect d’un code ; un contrat de lecture, auquel contribue le paratexte, « zone non seulement de transition mais de transaction1
 », produit une conduite de lecture (ainsi lorsque la Fontaine intitule son livre Fables choisies mises en vers, renvoie-t-il le lecteur à un genre répertorié, les animaux et la nature retraçant des comportements humains et sociaux). Une mention générique peut donc avoir un effet modélisant sur les textes à venir, garantir une unité thématique, une harmonie générale tout en permettant un changement progressif de tonalité. La réception enregistrera à la fois cette continuité et ces nuances…

Pour un best-seller « cross-age » comme la saga Twilight de Stephenie Meyer l’appartenance, ou l’inappartenance, générique s’actualise d’abord visuellement, puisque c’est le premier aspect que conçoit notre polysensorialité : les couvertures (de livres, dans un premier temps) disent-elles quelque chose du classement de l’œuvre ? Sans doute, car s’y conjuguent à la fois les marqueurs symboliques (une rose, un ruban), sexuels (la dame du jeu d’échec, la plume souillée) et enfin générationnels (le lettrage gothique des titres…).

Les illustrations de couvertures fonctionnent généralement en reflet ou en symptôme du contenu ; ici, elles obéissent davantage à la stratégie du symptôme, puisqu’elles sont au croisement d’une somme formidable de contraintes et d’intérêts : elles portent au rêve éveillé, en n’arrêtant pas l’imagination du lecteur par le fétichisme oblitérant d’un visage précis. Elles ouvrent les portes de l’interprétation flottante, de l’herméneutique sans obligation de résultat ; ce qu’elles communiquent reste non-clair, et touche à l’intime subjectivité.

Les « visuels » choisis ont puissamment contribué à la popularité mondiale de l’opus ; chaque fois déclinée dans les tons noir, blanc et rouge, l’image archi-symbolique qui accompagne la descente au tombeau de Bella Swan – car c’est bien de cela qu’il s’agit  – informe et cache à la fois le contenu explicite de chaque volume. Ruban à demi-déchiré, plume/fleur trempée de sang, pomme bibliquement offerte par on ne sait quelle tentatrice… distribuent une mythologie « mainstream 2
» et servent de liage cataphorique avec le contenu à venir – au-delà de cette magique « une » qui, si l’on sait la lire, chiffre merveilleusement et dit, à la fois transparente et opaque, le destin de Bella/Juliette en marche vers l’au-delà.

Tout se passe comme si, loin de rompre avec la tradition ou les préoccupations esthétiques « sérieuses », l’irruption des littératures de l’imaginaire – dont Twilight est la parabole parfaite – confortait en quelque sorte les recherches de l’ensemble des écrivains et des critiques de ce début du XXIe siècle, et confirmait la nécessité des genres, tout en prévoyant leur transformation. Si les écrivains des années 50 (Nouveau Roman) s’opposaient au roman et renonçaient à toute appellation générique, les auteurs actuels visent plutôt la polyphonie : un texte qui passe par tous les genres successivement comme une série de phases initiatrices, ou qui représente plusieurs genres à la fois. Il s’agit là d’œuvres migrantes3
 : l’adaptation filmique, et ses propres codes de distributions (affiches, teaser, promotion, publicités), introduit de fait un recentrement fréquent sur des visages et des silhouettes d’acteurs, qui met fin à l’indécision des symboles de couverture livresque et assume désormais, à lui seul, l’engouement auparavant distribué sur autant de supports fantasmatiques que de lecteurs ; de pluribus unus !

Quand Marguerite Duras, par exemple, qualifie India Song de « texte-film-roman », elle prépare cette transformation et l’insère dans le texte initial ; une interaction existe entre les techniques contradictoires des deux arts: des séquences filmiques s’immiscent dans La Pluie d’été, « roman » du scénario Les Enfants. Le regard y est particulièrement aigu, les objets détachés parfois de leur contexte : éléments symboliques que le film isole et utilise comme « ce fauteuil navrant » que les enfants installent au milieu de décombres. Mais il est clair que la singularité des deux formes d’art persiste par-delà l’affirmation de continuité ; l’enjeu est capital : le lecteur ne lit que ce qui lui parle en images et en mots ; et pour en revenir à Twilight, les couvertures, les affiches (du film), puis les jaquettes (des DVD) n’obéissent certes pas tout à fait aux mêmes logiques, mais seront vues, et adoubées, par les mêmes personnes…

L’examen de ces quatre images4
– qui dialoguent entre elles autant qu’avec la diégèse précise de chaque volume – confrontées aux visualités élues pour les adaptations cinématographiques nous amène ainsi à un constat liminaire limpide : l’esthétique des affiches de films (et des DVD après eux) substitue les visages des acteurs5
aux figures allégoriques des ouvrages, recourant ainsi à un tout autre clavier iconique et chromatique ; ce « troisième » dialogue informe et nourrit, rétroactivement, les résonances énigmatiques de la tétralogie ; précisons encore que la traduction française de la suite titulaire est assez distante des sèmes originaux, provoquant par là-même un effet supplémentaire d’incommensurabilité paradigmatique ; en effet, « Twilight » (en français « la saga du désir interdit », traduction de fait réservée au Canada francophone) se décline en Fascination, Tentation, Hésitation, et Révélation – ce qui transcrit de façon lointaine et allusive les originaux fondés sur la métaphore filée d’une nocturne : Twilight (Fascination), New Moon (Tentation), Eclipse (Hésitation) et Breaking Dawn (Révélation)6
.

Le titre du premier volume le plus communément reçu, Twilight, est devenu de fait le titre général de l’œuvre ; il donne d’entrée de jeu la caractéristique crépusculaire du propos, le « clair-obscur » des commencements cédant à la « nouvelle lune », puis à l’obscurité relative de l’éclipse, avant de s’exaucer en aurore prometteuse mais pleine de péril, renaissance de souffrance et de splendeur pour celle qui, comme Aragorn, a marché aux pays des morts. Nous ne nous interdirons pas pour autant le détour éclairant vers d’autres séries, d’autres images pour d’autres installations imag(in)eantes, bien sûr toujours asymptotiques ; car le « genre » (chick-lit, bit-lit..) peut-il commander l’imagerie ? L’image, au contraire, conditionne-t-elle le genre, en s’imposant comme intermédialité opérative ? Ce sera là le biais majeur de notre questionnement.

Nous nous proposons donc de détailler ces quelques remarques autour de trois grands items : une opérativité des symboles (opposée à celle des corps) ; l’hypothèse d’une mutation ; enfin l’agencement de l’innommable7
.

 

1. Une opérativité des symboles

 

Généralement, la couverture fonctionne en  inscription légitimante d’un produit stabilisé, pour l’insertion de cet objet littéraire dans un univers tissé d’autres discours et d’autres images. Les paramètres qui constituent cette scénographie relèvent autant du rituel des genres (codifié) que de la position supposée de l’énonciateur et du co-énonciateur (le lecteur) par rapport aux discours tenus, dans la société, sur la catégorie en question ; c’est pourquoi on peut désigner par « contexte » l’ensemble des traces perçues dans la conception des images, observables à travers les équivalents visuels de ce que seraient, dans le champ du texte, les embrayeurs, les déictiques et les modalisateurs – afin d’articuler les choix graphiques avec les autres « lieux » d’élaboration et de diffusion de l’œuvre.

Les illustrations qui (c)ouvrent les livres n’émargent donc pas toutes au même régime, ni sémiologique, ni référentiel.

La première couverture témoigne d’une « kitschisation » assez fréquente en chick lit, et plus encore en bit lit, de l’imagerie biblique : une pomme rouge, offerte au creux de deux mains marmoréennes, invitant le regard à plonger vers le bas de la page pour accepter ou non l’offrande proposée. Ce – discret – travelling immersif est pour le sociologue Bruno Latour8
une attente scopique répandue : notre lexique intérieur (pour reprendre les thèses de l’école de Constance9
) nous informe du contraste saisissant entre, d’une part, la blancheur excessive des bras, et, d’autre part, la tentation que le fruit, rond et coloré, doit suggérer pour un vampire, si tant est que la transposition avec le corps appétissant de l’héroïne Bella Swan, soit réalisée ; elle est semblable à ce fruit gorgé de vie et de promesse, déjà soumis à la menace que le titre, par le « l » de twilight démesurément allongé et aiguisé, fait peser sur elle. Mais à front renversé, nous pouvons décoder aussi cette pomme comme l’analogon de la connaissance ultime, offerte par le monde vampirique à l’enfant encore humaine : la coupe de l’immortalité à laquelle elle devra boire, ou renoncer. Or l’horizon de réception du cœur de cible (adolescents et jeunes adultes, massivement féminins de toute façon), est particulièrement sensible à l’ensemble des hypothèses visuelles partagées, ce qui amène de la part des concepteurs une prise en compte accrue des effets à produire (Wirkung).

Jardin d’Eden au fruit défendu, le livre peut alors s’ouvrir sur l’adolescence brumeuse de l’hostie, promise au double et déchirant amour d’un vampire et d’un loup-garou, sous la blême clarté de la « new moon » ; si l’humain est présent – dans le premier visuel (si l’on peut dire : c’est la pomme qui paraît vivante, et les bras et les mains qui, blafards, ressortissent plus au marbre qu’à la chair) – il s’absente presque complètement ensuite.

La fleur blanche du second volume, semblable au duvet du cygne/swan10
, est éclaboussée de rouge… et pend au bout de sa mince tige comme pour accentuer sa flétrissure prochaine et sa vénusté ; figure obligée et symbole facile, cette fleur souillée accompagne contextuellement la douleur de Bella, arrachée à ses illusions et à ses rêves, mais véhicule un halo de signifiance qui dépasse la diégèse précise et parle à toutes les sensibilités, à toutes les imaginations ; le succès de la saga est lié à cette compossibilité de rencontres et d’adhésion entre des mondes de représentations pourtant très distants.

Le troisième visuel est sans doute le plus riche, parce que le plus simple : un ruban rouge, qui serpente jusqu’à nous en montrant un large effilochement, exactement parallèle au « p » de Eclipse, lequel évoque aussi, bien entendu, les crocs acérés du vampire et leur coruscante agressivité… Bras humains et fruit dans le premier visuel, fleur rougie dans le second, simple objet dans le troisième : l’allégorisation de la défloration de l’héroïne se précise en s’absentant justement de toute prégnance trop charnelle – que ce soit la chair d’un fruit ou le velouté d’une fleur. L’image raconte aussi, par avance, les deux sacrifices ultérieurs qui attendent Bella : l’accouchement épouvantable, et la mort, inévitable. Ainsi, si les signes s’autonomisent les uns des autres en puisant dans des répertoires différents, ils entrent bien en résonance pour marquer les étapes du calvaire et de l’assomption de la jeune fille : tour à tour tentatrice et tentée, puis agressée et blessée, enfin épouse, mère d’un être qu’elle ne peut mettre au monde qu’en se brisant, et ressuscitée d’entre les morts11
dans son nouveau monde vampirique. « Non seulement, la littérature tient un discours sur le monde, mais elle gère sa propre présence dans ce monde12
 », rappelait Dominique Maingueneau en 1993 ; ne pourrait-on voir, dans la construction de ces couvertures, le même souci de singularité et de cohésion ?

Dans ces conditions, peut-on imaginer des « thanatofictions » – récits sur la mort, sur les corps des morts – suffisamment constructives et supportables pour s’adresser quand même à un public young adult et lui apporter une paradoxale leçon de vie – y compris par les exempla les plus loufoques (Forever, True Calling ou I M Zombie) ?

Toute la production contemporaine centrée sur le corps adolescent monstrueux ou mort-vivant, s’articule en trois mythèmes spécifiques dont seuls deux retiendront réellement l’attention : le/la jeune vampire (qui est un mort se sachant être mort), le/la jeune zombie (sans conscience dans The Strain13
ou The Walking dead14
, mais de plus en plus conscient ailleurs, en particulier dans In The Flesh ou Warm Bodies), enfin le métamorphe, généralement loup-garou, qui raconte une tout autre histoire puisque indépendante du passage par la mort.

Ces innombrables fictions où les corps altérés ou monstrueusement modifiés forment un nouveau baroque, où l’horrifique et l’émouvant s’épousent sans contrainte écrivent une esthétique du « comble », qui s’actualise par exemple dans le choix du jeune fantôme Victor/Louis Levanski15
, comme « icône » du feuilleton Les Revenants ; c’est son regard noir, ses traits figés indéfinissablement inquiétants et sa pâleur déconcertante qui « marquent » le best-seller inspiré par la série16
, et c’est aussi sa silhouette chétive et accusatrice qui, sur les jaquettes des DVD, focalise l’attention en occupant la place centrale, celle à partir de laquelle s’organisent et se hiérarchisent les autres personnages du récit. Quant au passage « courant » du roman au film, il s’inverse ici puisque la série pré-existe à la romance ; ce ré-échelonnement s’inscrit évidemment dans une époque précise et donne à lire des indices, témoins de genres distincts, car le cinéma reste art de la présence et la littérature celui de l’absence : « Un instant », rappelle J. Gracq dans En lisant en écrivant, « le courant du récit se fige (dans un roman, il n’y a jamais, jamais d’images, capables de se fixer sur la rétine […] et c’est la singularité du monde brusquement captée qui émerge seule, étrangère et toute puissante ».

Ajoutons encore que toutes ces images, affiches, couvertures… font l’objet de ce que l’on appelle les midnight release parties, qui ont concerné au premier titre les lecteurs qui ont grandi en même temps que Harry Potter, mais qui se sont maintenant généralisées à d’autres séries, films, DVD ou albums comme les Twilight Midnight Release Parties ou les événements organisés pour la sortie du dernier Star Wars.

 

2. L’hypothèse d’une mutation

 

« Ce mélange des genres, consubstantiel du mythe contemporain du vampire, révèle la marque du fantastique, art bigarré, fiché entre le grotesque chanté par Poe, le tragique issu de l’antiquité, et le sublime qui, par définition, confine au divin, entre terreur et fascination, superstition et religion, surnaturel et préternaturel 17
».

L’anthropo-thanatologue Louis-Vincent Thomas18
explique que le déni de la mort prend souvent deux formes : faire comme si la mort n’existait pas… ou bien agir comme si elle n’avait pas d’importance ; ce qui est une tout autre chose. En effet, comme tout « grand récit » humain, acté et sédimenté, la confrontation au surnaturel procède à la fois d’une « superstructure » culturelle (littéraire mais aussi filmographique…) et d’une « infrastructure » sociétale, le chronotope bakhtinien que forme la couverture fantastique se présente donc, par les fictions générées et l’intérêt dû à un phénomène de masse qui ne se dément pas, comme l’une des portes battantes vers l’autre monde ; les intercesseurs, les médiateurs, en assurent à la fois le sacré de cohésion et le sacré de transgression19
, ici marqué par le corps glacé d’un adolescent, en proie à toutes les lividités de la mort alors qu’il devrait manifester l’élan chaleureux et lumineux vers l’avenir. Le mythème vampirique, discrètement présent dans nos quatre couvertures, ressortit aux deux attitudes, en proposant ce que les mormons appellent le moment de l’exaltation divine. C’est ce que nous allons maintenant découvrir.

Il semble en effet que la quatrième image, qui re-géomètrise la fluidité ténébreuse des trois premières, projette une figure aux inférences très différentes, dans la mesure où la reine du jeu d’échec, occupant le premier plan, est justement extraite d’une « collection » déjà réalisée : les pièces du jeu ; il s’agit donc d’une citation ; blanche comme Jadis, la sorcière blanche de Narnia, elle l’emporte bien sûr en taille et en éclat sur l’arrière-plan, où se dresse un simple pion peint en rouge ; à partir du moment où le motif de l’échiquier réintroduit une mémoire artistique liée aux anamorphoses des toiles d’Holbein (Les Ambassadeurs, par exemple), il nous pousse à voir ce qu’il n’y pas : la mort, le crâne, occulté mais non pas totalement évacué, de cet ultime visuel, puisque l’échiquier est comme maculé de sang… comme si la modeste petite figure rouge (Bella dans son état humain ? les méchants vampires finalement vaincus ?) avait au prix d’un terrible déchirement accouché d’elle-même – la reine du jeu redevenue le cygne immaculé que dit son nom, « Swan » – Triomphe, ou pétrification ?

En tout cas, euphémisation là encore : ce n’est pas du sang qui teint l’échiquier, mais par simple effet d’optique le reflet du pion rouge. Le féminisme indéniable de la dernière couverture, rachète l’exténuation trop programmée des équivoques, dans cette figure inversée du commencement : le rouge est relégué à l’arrière-plan, et ce qui nous est offert en ostension c’est le blanc, une fois balayées les autres pièces et sacrifiée l’humaine condition. Les caractères choisis pour l’écriture des titres accompagnent le message en créant, par l’allongement ou l’aiguisement des jambages, un motif discrètement menaçant ; on se rappelle les « ff » de Buffy, tracés comme des poignards, par métonymie avec l’épieu dont se servait la Tueuse pour supprimer les vampires : ici, ce serait plutôt les crocs des prédateurs qui s’actualisent, dialoguant avec la vulnérabilité des objets proposés à notre sagacité.

Pourtant, s’il faut en croire les réflexions de Jacques Bouveresse dans l’essai Prodiges et vertiges de l’analogie20
, nous sommes peut-être trop prodigues en interprétations, insuffisamment attentifs aux contraintes matérielles qui président à ce type de construction : c’est vrai que les ambitions commerciales et artistiques se mélangent inextricablement, pour susciter une réactivité immédiate et si possible favorable à un objet ; nous sommes au croisement de logiques perçues comme différentes voire antagoniques, même si s’avère de plus en plus la réévaluation esthétique d’une production non homologuée comme telle ; cependant la lisibilité de chaque figure – unique, suffisamment abstraite pour ne pas trop en dire, suffisamment évocatrice pour accrocher le regard et l’attention – s’accompagne d’une mobilisation inconsciente du fonds culturel de chaque bassin : le « ruban », pour les Français, c’est le ruban volé des « Confessions » de J. J. Rousseau, le ruban de la comtesse Almaviva que Chérubin porte sur son cœur dans Le Mariage de Figaro, ou mieux encore le « ruban » dérobé par Horace à Agnès, dans L’École des femmes de Molière – ruban qui, si l’on s’en souvient, désigne déjà par un quiproquo savoureux la virginité peut-être « endeuillée » de la jeune fille. Pour les Américains, le ruban réfère prioritairement à la chanson très populaire « She wore a yellow Ribbon » (« elle portait un ruban jaune »), qui servira de titre au film de John Ford en 1949, lequel raconte l’histoire d’une jeune femme attendant le retour de son amoureux.

Il n’est en fait question ici que de tenir un discours de vérité, seul capable d’accompagner la morte jusqu’au bout de son chemin terrestre – avant de la remettre pour toujours à une autre mandature ; ce discours, c’est la parresia… et les « parrésiastes » opposent à la corruption de toute chair, surtout jeune et sacrificielle, l’évidence de leur tekhné – mariant le mythème de la Némésis (déesse du juste partage, et donc de la vengeance) à celui de Tisiphone (furie armée de fouets, et chargée de châtier, au fond de l’Hadès, les meurtriers).

De nombreuses séries fantastiques récentes nous confrontent, en effet, à la survie des jeunes morts – survie spectrale dans Afterlife (pour Alison Mundy), Medium (pour Allison Dubois) et Ghost Whisperer (pour Melinda Gordon), physiologique dans Les Revenants, In the Flesh ou Walking Dead… mais d’autres encore croisent deux ancrages a priori antinomiques : par exemple le récit d’autopsie et la « surnaturelle » vie des morts ; cette hybridation générique retransforme les cadavres en véritables acteurs de l’enquête, puisqu’ils demandent réparation ou, tout simplement, s’en remettent au légiste pour repartir 24 heures en arrière et empêcher ainsi leur meurtre… (Jon Harmon Feldman, Tru Calling, Compte à rebours, USA, 2003). L’intercession s’accomplit donc sous une ferme centripète : aider à revenir sur terre, à ré-habiter son corps, à renouer le fil de sa vie21
.

Cette récente figuralité d’enfants revenants, de jeunes spectres à demi bienveillants, à demi inquiétants, suscite la perplexité de William Marx : « Alors, mort de la littérature ou bien résurrection ? On le sait au moins depuis Œdipe roi : bien des prophéties provoquent leur propre accomplissement. Cassandre, n’est-elle pas l’autre nom de la fiction et de la littérature : celle qui dit le vrai sans qu’on ose y croire? 22
».

Proche de Bella Swan par la pâleur, le caractère hybride et la destinée incertaine, a surgi Olivia « Liv » Moore, une fille-zombie ravissante mais morte-vivante, qui a trouvé dans un IML matière à se nourrir (elle dévore les cerveaux des morts, acquérant au passage leurs qualités propres). Engagée par le légiste Ravi Chakrabarti, elle se débat sentimentalement entre son ex-fiancé Major, et son alter ego zombie Blaine… Il s’agit donc d’une « zom-com », une comédie zombique plus fantastique/fantaisiste que terrifiante. (iZOMBIE23
), spécialisée dans le « burlesque atroce » (saison 1, épisode 2) – sorte de transposition innocente de Hannibal.

On notera le générique BD (très drôle, en partie déjà utilisé dans Desperate Housewives)… En fait, tout est déjà un peu utilisé ailleurs de toute façon, avec des bulles pour retracer les différentes étapes (contagion, réveil) du processus. Il y a même un autre zombie, blond comme l’était le Spike de Buffy, Blaines : David Anders ; la scène augurale est soignée : Liv se réveille en sac mortuaire, super-pâle, et vomit. Le policier qui la voit se sauve, persuadé d’avoir mis une femme vivante dans une housse de morgue ; en fait, oui et non : « BUT I AM A ZOMBIE ! » est le leitmotiv qui vient scander toutes ses tentatives de retrouver une vie normale. Elle va faire équipe avec Clive Babineaux, détective afro-américain désabusé qui la croit médium : ainsi se trouve activé un trio blanche-indien-noir, bonne image du melting-pot. Se croisent les réminiscences d’autres « grandes » séries, Dollhouse pour les dons soudains, Tru Calling pour les flashs mémoriels liés aux tranches de cerveau.

Puisque « ce qui est enfoui finit toujours par refaire surface 24
», la sérialité « bit lit » serait-elle en charge d’une spiritualité désormais opaque ? Selon J.B. Pontalis dans Traversée des ombres, « il nous faut croiser bien des revenants […] converser avec bien des morts, donner la parole à bien des muets, […] pour enfin, peut-être trouver une identité qui, si vacillante soit-elle, tienne et nous tienne». C’est pourquoi la série de Bryan Fuller, Pushing daisies (2007), tient un discours inédit sur la mort : le héros, Ned, a la faculté de réveiller les morts en les touchant mais aussi celle de les replonger dans le néant en cas de second contact ! Chaque résurrection se prolongeant plus d’une minute entraîne inéluctablement une autre mort : amené à ressusciter son amour de jeunesse, Chuck, il ne peut se résoudre à la perdre de nouveau, lui sacrifiant un innocent. Le journaliste Lucas Armati, critique dans Télérama, résume avec pertinence le caractère exceptionnel de cette série méconnue : « Version fantastique des Experts ? Non, car l’emballage policier s’effrite vite pour livrer un conte kitsch, hyper visuel et attachant sur l’amour impossible de deux êtres qui ne peuvent se toucher sous peine de mort ».

Ce « mystère » pressenti autour du retour, ou de la survie, des morts s’actualise puissamment dans Forever (ou Éternel au Québec25
). De la même façon qu’on a assisté au retour du tandem Mulder et Scully sur la Fox – et donc au retour des autopsies bizarroïdes de la légiste Scully (X-Files) – on suit l’élégant légiste (il est britannique, ce que surlignent son goût pour les écharpes en cachemire et son accent snob) dans son éternité douloureuse, comme le signale la journaliste Nathalie Schuck : « Le docteur Henry Morgan (Ioan Gruffudd) est immortel depuis déjà deux siècles. Il en ignore la raison et n’accepte pas cet état mystérieux. […] Dans sa vie présente, il est médecin légiste à New York, ce qui lui permet d’étudier la mort sous toutes ses formes pour comprendre pourquoi il ne peut passer dans l’au-delà » (« Forever dégaine son héros immortel »).

 

3. L’agencement de l’innommable ?

 

« Comme au début de toute révolution, nous ne percevons pas encore les formes du monde futur, pris que nous sommes dans l’effarement face à ce que nous voyons disparaître sous nos yeux, assis au milieu des débris du monde passé, incapables d’imaginer l’avenir26
 ».

En somme, les distinctions aristotéliciennes entre des modes d’énonciation tels que le narratif et le représentatif seraient probablement opérationnelles pour redéfinir le champ de nos thanato-représentations. Des récits en mutation pourraient s’y mouvoir plus librement tout en connaissant les frontières qu’ils franchissent et les territoires qu’ils annexent. Tout se passe comme si le rêve de totalité cher aux Romantiques retrouvait ici une vigueur inattendue : la recherche d’un genre absolu s’accommodant pourtant d’une présentation morcelée et discontinue d’un réel lui-même fragmenté.

Il n’en demeure pas moins que ce qui prévaut aujourd’hui, comme « adynaton » majeur de la représentation déviante du corps adolescent, reste le zombie… Popularisé – comme nous venons de le dire – par la série I’M Zombie, ce rôle connaît une formidable recrudescence, que ce soit dans « God bless Zombies » websérie française de 6 épisodes de Paul Germain sur plateforme internet MyTF1, tournée à Caen (novembre 2015), ou dans le roman Zombie Nostalgie (Acte Sud, écrit par le norvégien Oystein Stene), qui raconte l’histoire d’un pays insulaire (dissimulé par les autres États) nommé Labofnia ; le héros, Johannes van der Linden, essaie de sauver des jeunes gens parqués comme les aliens dans District 9… On renverra pour « supplément d’informations » à l’article de Louise Florès intitulé « Pourquoi on voit des zombies partout ? » ; ludique, très documenté, il incite à tirer, de cet amoncellement hétéroclite mais ciblé, un enseignement à la mesure du phénomène : « Au-delà de son côté exutoire, le monstre nous touche parce qu’il cristallise l’homme devant la mort ; « Il est la maladie et le temps qui passe », poursuit Thierry Mornet […]. Une sorte d’incarnation de la maladie d’Alzheimer qu’il ferait bon massacrer, en somme 27
».

Plus récemment encore, plusieurs opus ont prolongé d’une façon originale et intéressante cette veine zombie ; résolument tournée vers le public adolescent, l’œuvre de Jonathan Levine Warm Bodies (Renaissance) raconte les amours difficiles entre un jeune zombie et une ravissante humaine. De la même veine, une autre réussite, la série britannique In the flesh (Dominic Mitchell, 2013-2015), décrit le difficile retour à la vie « normale » ( ?) d’un zombie réhabilité, jeune mort-vivant suicidé quatre ans avant et soucieux malgré tout de reprendre la vie commune avec sa famille ; Kieren Walker porte fond de teint et lentilles de couleur pour ne pas effrayer son entourage, deux fois traumatisé : par sa mort… et par sa résurrection ! Beaucoup plus proche, par la thématique intimiste, des Revenants français que des Walking Dead américains, chaque saison ne comporte que trois épisodes : le succès critique salue d’ores et déjà « un patient et captivant récit sur le pardon et le courage d’exister […] en attendant la suite ». Le même Pierre Langlais souligne toute la cruauté et la possible désespérance de ce sort terrible : « Kieren aura 18 ans pour le restant de sa vie – ou de sa mort. Son entrée dans l’âge adulte est repoussée pour toujours. Sa chair, à l’âge où elle devrait fleurir, est flétrie 28
», pour conclure quelques pages plus loin son analyse : « Une réussite troublante et crue, aux accents sociétaux, un peu comme si Ken Loach s’était aventuré dans le genre horrifique 29
». Le brutal « rotten » dont le qualifient, dans la version originale, les opposants (« pourri ! ») est à peine atténué par la traduction, puisque en français les zombies sont appelés les « putréfiés » : l’incommensurabilité est la même.

Métaphore, analogie, allégorie…, les régimes d’images se superposent dans les « visuels » de ces séries, littéraires ou filmiques, et créent un objet indépendant : un objet de consommation, certes, mais un objet qui « pense », un objet pensant (pour reprendre les positions de Gérard Wajcma30
).

Par comparaison, la grande fixité des jaquettes de DVD  mime les génériques des séries télévisées qui rassemblent les personnages dans une sorte de précipité de leurs postures et activités principales ; souvent tournés vers nous mais en point de fuite, les héros nous convient tacitement à venir les rejoindre, installés dans une anaphore résomptive des situations réciproques : ni réalistes, ni abstraites, ces imageries puisent leur efficace dans l’engouement planétaire pour le casting – qui a donc remplacé l’impersonnalité des premières couvertures. A l’arrière-plan, on distingue, comme par une sorte de bande-annonce fixée dans l’espace, les autres protagonistes mineurs, et quelques-uns des « moments forts ».

Il est vrai qu’on souligne souvent la « bassesse » des objets et la « hauteur » du sujet, mais ici les deux choix excipent d’une même pertinence : agencer l’innommable, ou plutôt l’in-nommé ; le cœur de cible de Twilight, plus féminin, que masculin, reçoit comme les pièces d’un puzzle à interpréter et à reconstituer les messages successifs des compositions de couvertures : le ruban déchiqueté, encore lui, renvoie à tout un engramme inépuisable de perte, de rupture, d’attachement délié et dénoué, et rejoint par syllepse herméneutique, la « cruche cassée31
 » de Greuze (un peu moins celle de Kleist32
), ou les allusions grivoises de Beaumarchais dans Le Mariage de Figaro : « tant va la cruche à l’eau qu’à la fin elle… s’emplit ».

Les quatre tableaux formant couverture ont été immédiatement adoubés par une communauté lectante, partageant une poéticité élémentaire mais efficace ; voici d’ailleurs ce qu’en dit textuellement l’auteur, Stephenie Meyer : « Le pomme sur la couverture de Fascination est à la fois le symbole du fruit défendu et le symbole du choix, le ruban d’Hésitation représente l’impossibilité de laisser son passé derrière soi, et la couverture de Révélation symbolise l’évolution de Bella dans la série 33
» ; on apprend incidemment que le troisième visuel a été réalisé sans l’avis de l’auteure, ce qui ne l’invalide en rien, d’ailleurs. La nouvelle dérivée d’Eclipse, L’appel du sang34
(titre à l’explicite agressif, nullement contenu dans l’original, plus « soft » et plus mystérieux : The short second life of Bree Tanner) s’orne d’ailleurs d’un sablier au sable rouge, parfaite transition entre le temps humain, mesuré et compté, et l’éternité vampirique – qui immobilise les lignes et fige le présent en destin.

Dans un registre mineur, la multiplication des adolescents vampires dans les short com (toujours suffisamment glamour pour ne pas susciter l’horreur pure, mais assez inquiétants pour marquer la rupture avec la norme) nous renvoie aussi à la même mode « bit lit », dont la canadienne « Ma baby-sitter est un vampire 35
» ou la colombienne « Chica Vampiro 36
» sont de charmants épigones.

Ces séries sont surplombées par la puissante ambiguïté qui gouverne notre confrontation au corps mort, au corps du mort, et revêtent une figure archétypique particulièrement riche en enseignement : la fascination épouvantée pour l’objet-cadavre (et son cortège de fictions exorcisantes sur les spectres, zombies, vampires, revenants… qui en sont la textualisation fantasmagorique). Certaines séries cependant acceptent aussi d’engager le spectateur sur la voie de la déception : en effet, ni la foi ni le discours posthumaniste n’éliminent les incertitudes de la responsabilité ou des difficultés relationnelles. Il semble donc en définitive que le transgenre vampirique soit particulièrement en adéquation avec l’esprit de l’époque, et son esthétique disparitionniste. Évoquons brièvement pour clore ce chapitre quelques autres couvertures, appartenant au même canon  : les novélisations37
de Buffy mettent en surexposition le visage de Sarah Michelle Gellar, Vampire diaries38
commence par le même choix iconique que Twilight (objets cryptés : clé, plume, pomme à demi croquée, bougie, toujours tachées de sang, en trichromie blanc/rouge/noir), puis propose rapidement, au fil des rééditions, des visages jeunes et sexy en couvertures – plus ou moins inspirés des acteurs de la série ; enfin True Blood (en fait La Communauté du Sud de Charlaine Harris) refuse toute euphémisation (visage féminin en très gros plan, léchant d’une langue cramoisie du sang qui dégouline à la commissure des lèvres, avec vue sur croc surnuméraire à gauche de la mâchoire39
). Mais nous sortons alors des littératures pour adolescents, et la comparaison s’éteint d’elle-même.

 

En conclusion, il semble bien que la question de la valeur esthétique du genre se pose. Disons qu’il est indispensable d’étendre la notion d’acceptabilité à des marges autrefois exclues de la lecture et de la critique, à condition que ces accompagnements aient pour objectif de mettre en lumière le travail du texte proprement dit. En ce qui concerne l’observation des forces et enjeux qui disent le contexte énonciatif des images, leur accueil dans le public et plus largement toutes les relations qui les unissent à la société, la prise en compte des choix de couvertures semble légitime et indispensable, pour une acception élargie de la notion d’art, certes, mais à l’intérieur duquel des frontières persistent, et pour une inscription de ce genre (la « bit-lit ») dans un tissu social (ou paratopie) complexe, nécessaire et problématique, comme l’indique Pierre Barbéris : « Aussi la critique moderne a-t-elle habilité le fragment et le brouillon, l’avant-texte ou le péri-texte et ne s’en tient-elle plus aux chefs-d’œuvre en majesté des institutions40
».

Ouvrir un livre, aller au-delà de l’illustration, tapageuse ou absconse, de la couverture, nécessite que soit franchi un seuil, et que l’appel du visuel ne soit ni trop singularisant, ni trop universel ; c’est cette transaction que semble bien réussir l’entreprise de monstration contemporaine du jeune non-mort, ou déjà-mort, ou devant mourir… Ornementation de dentelle noire quasi sculptée dans la couverture, larmes de sang au coin des lettres, mise en tensions de tous les poncifs du décor gothique obéissent à la logique de la collection, en ré-assemblant autrement chaque fragment visuel du paradigme « bit-lit » ; l’objet ainsi obtenu peut emblématiser une génération, un sexe, une obsession, au-delà ou en-deçà des critères habituels du « bon goût » ou de « l’apport », généralement associé à l’œuvre d’art.

C’est sans doute ce dilemme, entre trace et lumière, que réarme et suggère la posture nouvelle de l’aca-fan, hybride mais intellectuellement productive, telle que décrite dans l’étude de Cristofari et Guitton : « Les contraintes sont donc asymétriques : il suffit de se déclarer fan pour l’être, mais s’identifier en tant qu’universitaire présuppose de rigoureusement effectuer un travail correspondant. Un aca-fan serait donc avant tout par définition un universitaire, par ailleurs intégré à une communauté de fans, plutôt qu’occupant une position exactement intermédiaire ou hybride41
».

 

(T&C, Université d’Artois)

 

 

Notes et références

  • 1Gérard Genette, Seuils, p. 8.
  • 2En référence à l’ouvrage de Frédéric Martel, Mainstream, Enquête sur cette culture qui plaît à tout le monde, Paris, Flammarion, 2010. Il est clair aussi que les couvertures ne « choquent » pas des publics plus sensibles que les occidentaux, et correspondent ainsi à la fois aux attentes d’une édition pour la jeunesse ET aux pudeurs de cultures plus réservées.
  • 3Pour reprendre les mots, et la position, de Gracq : « A notre époque où toute conception d’art est sollicitée par une incarnation double, triple et peut-être même quadruple […], je crois pouvoir annoncer le temps où un plus décisif s’attachera aux œuvres migrantes, à celles qu’une forme d’expression unique ne suffira plus à emprisonner », En lisant, en écrivant, Paris, Corti, 1986.
  • 4La conception originale est due à Gail Doobinin, et la réalisation photographique à Roger Hagadonne, pour Little et Brown.
  • 5On remarque tout de suite la vénusté des visages et des corps, leur pose doucement provocante mais finalement hiératique.
  • 6La tétralogie est publiée à l’origine aux États-Unis par Little, Brown and Company, (New York) entre 2005 et 2008. Nous utiliserons désormais les abréviations respectives suivantes : Tw, Ec, NM et BD
  • 7Rappelons que c’est le sens du mot « Nosferatu » (qui ne se peut nommer), titre et personnage éponyme du film de Murnau.
  • 8Auteur en particulier de Nous n’avons jamais été modernes, Paris, La Découverte, 1991.
  • 9Dans les années 1960-1970, l’École de Constance (du nom d’une ville du Sud de l’Allemagne, en Bavière) va établir le canon de la « réception », à partir d’un texte écrit en 1967 par H. R. Jauss, intitulé L’Histoire littéraire comme défi à la théorie littéraire, adossé aux travaux du polonais Roman Ingarden, (regardé comme le fondateur de l’esthétique phénoménologique) comme à la réflexion de Hans-Georg Gadamer, disciple de Heidegger et spécialiste de l’herméneutique. Les deux principaux chercheurs sont Wolfgang Iser (tenant de « l’acte individuel de lecture »), et Hans-Robert Jauss (tenant de la « réponse publique au texte »).
  • 10Anne-Sophie Warmont a attiré mon attention (qu’elle en soit ici remerciée !) sur le fait que l’héroïne de Pirates des Caraïbes s’appelle aussi Swann (Elizabeth…) et qu’elle attendra son époux, le Hollandais volant, tout au long de sa vie terrestre… Lui est devenu immortel, mais pas elle.
  • 11Isabella Marie Swan naît le 13 septembre 1987 et s’éteint le 10 septembre 2006, à l’âge de 19 ans. Edward Masen-Cullen, son époux, est né en 1901 et est mort de la grippe espagnole en 1918. Il a donc 17 ans pour l’éternité.
  • 12Dominique Maingueneau, Le Contexte de l’œuvre littéraire, Dunod, 1993, p. 20. Il ajoute « l’appartenance au champ littéraire serait une difficile négociation entre le lieu et le non-lieu, une localisation parasitaire, qui vit de l’impossibilité même de se stabiliser. Cette localisation particulière, nous la nommerons paratopie » ; là encore se dessinent des similitudes avec le « lieu » assigné à la bit-lit, sous-genre d’un sous-genre, émergeant pourtant et suscitant gloses et ré-articulations légitimantes.
  • 13Guillermo del Toro, The Strain, 2014, deux saisons. Décapitée dans l’épisode 4 de la saison 1, l’enfant monstrueuse est en fait habitée par un parasite anthropophage qui l’a transformée en simple incubateur. Elle n’est donc plus « elle-même » quand Abraham Setrakian, le chasseur de vampire, l’exécute pour l’empêcher de nuire.
  • 14… ou son prequel Fear of the Walking Dead.
  • 15Le jeune interprète, Swann Nambotin, a acquis une renommée foudroyante et immédiate, reléguant dans l’ombre quasiment l’ensemble du casting.
  • 16Seth Patrick, Les Revenants, trad. Sébastien Baert, Paris, Michel Lafon, 2015.
  • 17Brice Guérin, « Vampire », p. 984-990, dans Valérie Tritter (dir.), Encyclopédie du fantastique, Paris, Ellipses, 2010.
  • 18Voir Louis-Vincent Thomas, La Mort en question : traces de morts, mort des traces, Paris, L’Harmattan, 1991.
  • 19Ainsi que le distribue Roger Caillois dans L’Homme et le sacré, Paris, Gallimard 1970.
  • 20Jacques Bouveresse, Prodiges et vertiges de l’analogie, Paris, Éditions Raisons d’agir, 1999.
  • 21La série britannique The Fades (Jack Thorne, 2011) véhicule un autre message : les morts invisibles nous environnent, et il faut les empêcher de ressusciter pour anéantir les vivants ; heureusement, un « élu », Paul, les voit et lutte contre le plus maléfique d’entre eux.
  • 22Marx William, « Ci-gît et renaît la littérature », in Le Magazine Littéraire n° 525, dossier « Ce que la littérature sait de la mort », novembre 2012, p. 79.
  • 23Série télévisée américaine développée par Rob Thomas (auteur de Veronica Mars) et Diane Ruggiero-Wright d’après la série de comic book éponyme de Chris Roberson et Mike Allred, et diffusée depuis le 17 mars 2015 sur le réseau The CW. (programmation sur France 4 à la rentrée 2015).
  • 24Jacques Morice, Télérama n°3313, 10/7/2013, p. 110.
  • 25Série télévisée américaine comportant 22 épisodes de 42 minutes créée par Matt Miller, diffusée entre le 22 septembre 2014 et le 5 mai 2015 sur le réseau ABC aux États-Unis et 25 heures en avance sur le réseau CTV au Canada ; et en France : du 28 avril 2015 au 16 juin 2015 sur TF.
  • 26Frédéric Martel, op.cit., p. 443.
  • 27Louise Florès, « Pourquoi on voit des zombies partout ?, Marie-France, janvier 2013, p. 70.
  • 28Pierre Langlais, « Moi, zombie, 18 ans, mal dans ma peau », dans Télérama, n° 3336-3337, 18/12/13, p. 186.
  • 29Op. cit., p. 216.
  • 30Voir Gérard Wacjman, Les experts, la police des morts, PUF, Paris, 2012.
  • 31Jean-Baptiste Greuze, entre 1772 et 1774 : une jeune fille, cotillon relevé sur une brassée d’œillets, ne sait quoi faire de ses fleurs une fois cassée la cruche qui devait les accueillir…
  • 32La pièce Die zerbrochene Krug fut écrite en 1808.
  • 33Voir interview de Stéphanie Meyer sur http://www.lecture-academy.com/stephenie-meyer-vous-a-repondu/#.V58WsI7zY4A
  • 34Stephenie Meyer, L’Appel du sang, trad. par Luc Rigoureau, Paris, Hachette, 2010.
  • 35Série canadienne de 26 épisodes de 22 min, 2 saisons (2011-2012), créée par Bruce McDonald et inspirée du téléfilm éponyme, sorti en 2010 (My Babysitter’s a Vampire). Elle narre les aventures de Sarah, entourée de ses amis Ethan, Benny, Erica et Roy.
  • 36Créée par Marcela Citterio, cette télénovela de 120 épisodes de 45 min chacun (mars-novembre 2013) raconte les amours et les catastrophes de Daisy, jeune vampire dont l’amoureux humain, Max, ignore tout de sa condition.
  • 37Aux éditions M6-Fleuve Noir.
  • 38Aux éditions américaines Harperteen.
  • 39Aux éditions britanniques Gollancz, Orion Publishing.
  • 40Pierre Barbéris, « La sociocritique », dans Introduction aux méthodes critiques pour l’analyse littéraire, Paris, Bordas, 1990.
  • 41Cécile Cristofari et Matthieu J. Guitton, « L’aca-fan : aspects méthodologiques, éthiques et pratiques », Revue française des sciences de l’information et de la communication [En ligne], 7 | 2015, mis en ligne le 30 septembre 2015, consulté le 24 juillet 2016. URL : http://rfsic.revues.org/1651

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